Leur martyre est le sommet de leur vie missionnaire. Mgr Enrique Angelleli, le père Gabriel Longueville et leurs deux compagnons ont été béatifiés le 28 avril dernier en Argentine. Assassinés en 1976, leur service auprès des plus pauvres nous révèle un zèle missionnaire hors du commun. « Il n’y a pas d’évangélisation en laboratoire : l’évangélisation est toujours faite au corps-à-corps, c’est quelque chose de personnel, sinon ce n’est pas de l’évangélisation. Corps-à-corps avec le peuple de Dieu et corps-à-corps avec la parole de Dieu », lançait le pape François devant des jeunes français du diocèse de Viviers, à la suite de leur pèlerinage en 2015 en Argentine sur les pas du père ardéchois Gabriel Longueville. Le Saint-Père saluait alors la compréhension profonde de l’évangélisation de Mgr Angelelli — qu’il a personnellement connu — proche du père Longueville.
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Ce « corps-à-corps » de l’évangélisation a conduit le père Longueville et Mgr Angelelli à la mort. En Argentine, en cette fin du XIXe siècle, il ne fait pas bon être prêtre. En 1976, un coup d’État militaire met fin à la présidence d’Isabel Perón. Les prêtres, évêques, sont menacés de mort, en raison, entre autres, de leur engagement envers les plus pauvres. Sous la dictature de Jorge Rafael Videla, plus de dix mille personnes sont fusillées, trente mille sont portées disparues, neuf mille doivent être comptées comme prisonniers politiques et un million seront contraintes à l’exil…
Le père Gabriel Longueville, la mission auprès des pauvres
Le 18 juillet 1976, c’est au tour du père Longueville, ainsi que son vicaire Carlos de Dios Murias, d’être séquestrés puis conduits jusqu’à une base aérienne. Sur place, ils sont interrogés, torturés et finalement tués. Les cadavres seront retrouvés deux jours plus tard, criblés de balles. Le 4 août de la même année, c’est à l’évêque Mgr Angelelli de mourir en raison de sa foi. Sur la route du retour d’une messe en mémoire des pères Longueville et Carlos Murias, le prélat meurt dans un accident. Il s’avèrera être en réalité le résultat d’un sabotage.
Une immense perte pour l’Argentine pour laquelle le père Longueville avait tout donné. Prêtre diocésain de Viviers en Ardèche, il sent très vite l’appel à la mission. En 1969, il part en Amérique latine en tant prêtre « fidei donum » afin de se mettre au service d’une église sœur. En l’occurrence celle du diocèse de Rioja, dans le fin fond de l’Argentine. Persuadé que « Dieu se révèle aux plus pauvres », il œuvre sans cesse auprès des plus marginalisés de sa paroisse de Chamical. Avec son vicaire, ils forment un tandem infatigable au service de ceux en difficultés avec une patience infinie.
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Pour lui, la mission du pasteur n’est pas réduite à la seule conduite des âmes, sa responsabilité consiste aussi à rendre la dignité à l’homme, quitte à agir politiquement. La riche formation qu’il offre aux plus démunis et la conscience qu’ils acquièrent entraîne une opposition notamment des propriétaires qui préfèrent pouvoir exploiter des employés naïfs et peu formés.
Ces saints « prêts à embrasser la croix »
Si les pères Longueville et Murias ont pu être aussi actifs dans leur mission auprès des plus pauvres, c’est notamment grâce au soutien de leur évêque, Mgr Angelelli, canonisé lui aussi ce samedi 27 avril et proche des aspirations missionnaires du prêtre français. Pour annoncer la Bonne nouvelle, il faut « toujours avoir une oreille tournée vers le peuple, et l’autre vers l’Évangile ». Voilà comment le pape François avait ainsi résumé l’enseignement du défunt évêque devant les jeunes ardéchois en 2015.
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Père conciliaire de Vatican II, Mgr Angelelli est nommé à partir de 1968 à la tête de la Rioja. Il favorise la formation de coopératives paysannes et stimule la création de syndicats ouvriers mais aussi agricoles, de mineurs ou de personnel domestique. Dès l’arrivée dans son diocèse, l’évêque attire de nombreuses vocations sacerdotales et de nombreux fidèles. En véritable missionnaire, il n’hésite pas à se rendre dans les coins les plus reculés de son territoire pour y célébrer la messe, proclamer la parole de Dieu ou tout simplement apporter un peu de chaleur humaine.
Comme l’a souligné le cardinal Angelo Becciu, préfet de la Congrégation pour la cause des saints, dans son homélie lors de la canonisation qu’il présidait, les deux hommes sont des exemples de « charité ardente, forts dans la foi même dans les difficultés, prêts à embrasser la croix ».
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