Alexis Michalik porte à l’écran sa pièce de théâtre Edmond, créée en 2016 et récompensée aux Molières l’année suivante, avec brio et sans limites.Une tirade du nez connue de tous, une histoire d’amour toujours classée parmi les plus touchantes, un succès tel qu’il n’était plus possible de le refaire au cinéma. Et pourtant, Cyrano avait encore bien des mystères. Ou plutôt son auteur, que l’on découvre aussi passionné et intègre que les vers de son héros poète.
Le surdoué du théâtre invite le spectateur dans les coulisses d’une pièce à succès, dont la sienne a su tirer parti pour nous rendre toujours plus attachant le personnage de Cyrano et avec lui son créateur. Au casting une flopée de comédiens de talent, avec le verbe et le phrasé si précieux que l’on trouve sur les planches. Pour lesquelles on déplore parfois les marques du cinéma et ses travellings, sa caméra qui bouge et vit sans cesse, au lieu de nous laisser goûter ces instants de théâtre avec leur cadre ajusté à la scène.

Un amour qui fait l’impasse sur la vulgarité
Le réalisateur a entièrement modifié son casting, en dehors de Jean-Michel Martial, le propriétaire d’un café au verbe et à l’esprit suffisamment aiguisés pour encourager le jeune Edmond Rostand (Thomas Solivérès) à se lancer dans l’écriture de sa pièce. Commandée à brûle pourpoint par un comédien ambitieux, celle-ci le trouve au plus bas de sa réputation et de son inspiration. Alors quand un de ses amis le met sur le chemin de sa muse… son histoire émerge enfin. Sa femme, incarnée par Alice de Lencquesaing qui joue toujours si juste, l’encourage, mais de loin, ayant peur qu’il soit amoureux de Jeanne, la future Roxanne. Commence alors l’histoire que tout le monde connaît, les arcanes amusantes du casting d’une pièce de théâtre en plus, où Roxanne et ses soupirants nous interrogent sur la valeur de la beauté quand l’esprit et le panache ont tôt fait de lui faire de l’ombre.
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Fin XIXe, dans un Paris où Feydeau fait salles combles, où les bordels se mêlent à la vie des théâtres, le jeune dramaturge et son esprit fleur bleue détonnent. L’amour selon Edmond, et selon Cyrano, fait non seulement l’impasse sur la vulgarité mais aussi l’infidélité. Et le moment ultime de la représentation nous fait bien vite oublier quelques lourdeurs du scénario. Avec “Ave generosa” d’Hildegarde von Bingen ou encore le “Bolero” de Ravel en fond musical, ce film permet assurément de vivre un superbe moment de théâtre, au cinéma.
Edmond, d’Alexis Michalik, inspiré de sa pièce de théâtre, avec Thomas Solivérès, Clémentine Célérié, Mathilde Seigner, Alexis Michalik et Olivier Gourmet. En salles.

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