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Chateaubriand, pour la gloire des lettres et du Christ

CHATEAUBRIAND
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Benjamin Fayet - publié le 01/11/18
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Perrin ressort judicieusement l’excellente biographie de Chateaubriand par Gislain de Diesbach. Paru pour la première fois en 1995, ce très dense ouvrage offre un des livres les plus éclairants sur le génie des lettres, défenseur insatiable du catholicisme dont nous célébrons cette année les 250 ans de la naissance. On plonge dans ce livre avec délice tant son écriture est à l’avenant du brillant de la vie illustre de son sujet. S’il décortique l’œuvre flamboyante, l’auteur ne tombe heureusement jamais dans l’hagiographie car, malgré l’immense talent, l’homme a aussi ses médiocrités et n’hésite pas à prendre quelques étonnantes libertés avec la vérité. Elles ne sauraient toutefois faire oublier la hauteur de vue et le génie de cet écrivain qui mit toujours au centre de sa vie et de son œuvre sa foi en Dieu. Précurseur du Romantisme qui inspira tout le XIXe siècle littéraire, il s’engagea toute sa vie au service de la monarchie des Bourbons et du catholicisme. La religion mise à mal par les années révolutionnaires ainsi que les massacres de ces temps sombres vont très rapidement l’horrifier et l’amener sur le chemin de l’exil, vers les terres vierges des États-Unis, puis vers la cité brumeuse de Londres. Il assiste de l’étranger alors aux déchirements de la France qui plonge dans la guerre civile après 1789, et dont une partie de la population se détache d’un régime qui souhaite l’éloigner de ses autels et de ses prêtres. C’est dans ses années d’exil qu’il publie ses premiers écrits et qu’il décide d’embrasser cette carrière d’homme de lettres, avec un essai dans lequel il tente d’analyser les origines de la révolution française.



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Il ne rentre en France qu’en 1800 après le coup d’État du 18 brumaire par Bonaparte. Celui-ci, conscient de la nécessité d’une pacification religieuse, rétablit par un concordat les rapports de l’État français avec l’Église et le Vatican. En 1802, la publication de son flamboyant livre Le Génie du Christianisme entre ainsi en accord avec la politique de pacification religieuse voulue par le Premier consul. Chateaubriand, comme Napoléon, toutefois pour des raisons différentes, souhaite rattacher la France à son héritage chrétien brisé par la Révolution. Il dégage dans ce livre la dimension poétique de la religion et de ses rites avec des lignes empreintes d’une grande sensibilité préromantique. Il y restitue le souffle poétique du Moyen Âge qu’il oppose à la rationalité des Lumières. Le succès du livre est immense et fait écrire à Gislain de Diesbach qu’ “il a réhabilité la religion chrétienne aux yeux d’une génération nouvelle qui s’enthousiasmera pour tout ce qu’il a remis à l’honneur, cérémonies du culte, objets d’art sacré, cimetières de campagne — et prendra des sujets religieux comme thème en littérature et en peinture.” Chateaubriand lui-même résume ainsi sa pensée : “De toutes les religions qui ont jamais existé, la religion chrétienne est la plus poétique, la plus humaine, la plus favorable à la liberté, aux arts et aux lettres. Le monde moderne lui doit tout, depuis l’agriculture jusqu’aux sciences abstraites, depuis les hospices bâtis pour les malheureux jusqu’aux temples élevés par Michel-Ange et décorés par Raphaël. Il n’y a rien de plus divin que sa morale, rien de plus aimable, de plus pompeux que ses dogmes, sa doctrine et son culte ; elle favorise le génie, épure le goût, développe les passions vertueuses, donne de la vigueur à la pensée, offre des formes nobles à l’écrivain et des moules parfaits à l’artiste.”



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Le succès de l’ouvrage est immense, et après des années de haine anti-chrétienne, il formera pour beaucoup de catholiques une source d’espoir et d’inspiration. C’est un ouvrage qui remue les âmes même si le livre n’échappe pas à la critique de certains catholiques. On lui reproche ainsi le caractère par trop mélancolique du livre dans lequel il défendrait la religion avec la prose du poète et non pas avec les arguments du théologien. Alors apprécié par Napoléon au sommet de son pouvoir, le Premier consul l’envoie en mission à Rome avec son oncle le cardinal Fesch. La relation entre les deux hommes se dégrade très vite, et Chateaubriand quitte Rome sous la pression du prélat, peu enclin à subir le caractère envahissant de l’écrivain. C’est alors qu’il publie Les martyrs, autre œuvre majeure, écrit à la manière d’un mystère du Moyen Âge, évoquant le triomphe de la religion chrétienne sous le règne de Dioclétien à travers l’histoire du Grec Eudore. Entré dans l’opposition au pouvoir, il décide alors de prendre son bâton de pèlerin et réalise son fameux voyage vers la Terre sainte dont il tirera le fameux Itinéraire de Paris à Jérusalem publié en 1811. Il sera fortement marqué par ces jours passés dans la Ville sainte et par l’accueil reçu de la part des communautés monastiques comme celle de Jaffa, dont la précarité lui fera écrire : “L’état où ils vivent ressemble à celui où on était en France sous le règne de la Terreur”. Toute sa vie durant, il restera ainsi un grand défenseur des chrétiens d’Orient dont il n’oubliera jamais l’accueil chaleureux.

Ce retour en France est marqué par une opposition de plus en plus forte à l’encontre du régime de Napoléon et ses dérives dictatoriales, après l’exécution du duc d’Enghien et d’Armand de Chateaubriand, espion de la cause royaliste. C’est à la chute de Napoléon en 1814 qu’il entame une carrière politique sous la Restauration, hantée toutefois par de nombreuses désillusions. On craint son influence et on lui reproche un temps de s’être rapproché de Bonaparte au début de son règne. Il obtiendra cependant quelques places prestigieuses comme les ambassades de France en Prusse, à Londres et à Rome, ainsi que très brièvement le ministère des Affaires extérieures. Des postes qui ne l’empêcheront pas d’écrire sa plus grande œuvre, ses fameuses Mémoires d’outre-tombe, qui couronneront pour la postérité une œuvre littéraire et une vie que Gislain de Diesbach retrace avec la minutie de l’érudit et le talent du grand écrivain.

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