Le dernier documentaire du cinéaste serbe a de quoi détonner à la Mostra de Venise. Son héros est l’ancien président uruguayen, José Mujica, autrefois surnommé “le président le plus pauvre du monde”.“La première fois que j’ai vu Mujica, il était assis sur un tracteur. On m’a dit, voilà le président, et je me suis dit, voilà mon homme”, raconte Emir Kusturica, deux fois Palme d’or à Cannes, Papa est en voyage d’affaires et Underground. Dix ans après la sortie de son film consacré à Maradona, légende d’Amérique latine, Kusturica revient sur une figure du continent à l’occasion du 75e festival de cinéma de Venise : “Pepe” Mujica, ex-président de l’Uruguay.
Mujica : “Mon monde est ailleurs”
L’ancien guérillero, loin des habitudes du faste et de la gloire, qu’il rejette, a accepté d’accompagner le réalisateur pour présenter le documentaire El Pepe, una vida suprema (Pepe, une vie suprême) qui retrace principalement sa dernière journée au pouvoir. Le documentaire montre aussi des entretiens entre les deux amis sur des sujets universels comme la mort et la famille. À l’origine, le film devait s’appeler “Le dernier héros”. Cette autre facette de sa vie, basée sur les tortures qu’il a endurées pendant la dictature et qui a déclenché son parcours politique, est présentée dans un deuxième film plus intimiste du réalisateur uruguayen Alvaro Brechner : “Une nuit de 12 ans”.
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Lors de la présentation officielle, l’ancien chef d’État a une nouvelle fois mis de côté les honneurs, trait caractéristique de sa présidence (2010-2015). “Je ne suis pas une star. Je suis ici uniquement à cause d’un ami, un ami qui s’appelle Kusturica. Mon monde est ailleurs, je ne sais pas s’il est mieux ou pire, mais il est autre”, a-t-il expliqué alors que des étudiants de son pays criaient son nom à l’entrée de la salle.
Humilité et engagement
Fin 2016, alors que le tournage s’achevait dans sa ferme située en périphérie de Montevideo, il avouait attendre du projet “qu’il transmette un message d’humilité et d’engagement”. Le réalisateur a en effet choisi de capter des scènes de vie où le vieil homme de 83 ans (81 ans au moment du tournage) enseigne à des jeunes comment cultiver, et admire “sa façon presque religieuse d’être connecté avec la terre”.
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Connu pour ses extravagances, le cinéaste serbe l’est aussi pour la chaleur et l’enthousiasme qu’il transmet lors de ses concerts avec son groupe le No smoking orchestra. Il est également orthodoxe, défenseur de l’écologie, opposant notoire au système d’Hollywood et attaché à la famille. Ce n’est donc pas étonnant qu’il veuille mettre en vedette un personnage à l’opposé des héros que l’on présente aujourd’hui, “pas autant populaire qu’il le souhaiterait”, autrefois le président le plus pauvre du monde qui reversait ses revenus pour financer des logements sociaux.