Au moins deux personnes ont été tuées et dix autres blessées dimanche dans des échanges de tirs à Bangui dans le quartier musulman du PK5. Quelques jours auparavant, le cardinal centrafricain Dieudonné Nzapalainga avait appelé les chrétiens de son pays à ne pas se venger des attentats perpétrés contre eux.Le 1er mai, une attaque menée contre l’église Notre-Dame-de-Fatima, à Bangui a été suivie de représailles. Le prêtre, qui officiait à l’occasion de la Saint Joseph devant une foule de 1500 personnes, a été tué par cinq assaillants. Ils avaient tiré au fusil d’assaut et lancé deux grenades. Les participants à la messe, en colère, ont porté son corps jusqu’à la résidence du président Faustin-Archange Touadera, brûlant au passage une mosquée. Au soir de cette journée, on dénombrait 24 morts et plus de 170 blessés. Un autre prêtre catholique a été tué dans la semaine qui a suivi. De nouveau, dimanche 6 mai, des échanges de coups de feu ont été entendus, et des militants musulmans ont tenté de détruire une église catholique et une église protestante en représailles à la destruction de leur mosquée.
Les milices contrôlent la majorité du pays
La République centrafricaine a connu de nombreux épisodes de violences entre groupes armés, qui ont atteint un point culminant en 2013 et 2014 lors de la Bataille de Bangui. Au cours de cette bataille, l’église Notre-Dame-de-Fatima avait déjà été attaqué, et son prêtre tué.
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Quand on lui demande pourquoi le Centrafrique ne parvient pas à sortir de la pauvreté et de la guerre, Mgr Dieudonné Nzapalainga, 51 ans, premier cardinal du Centrafrique et président de la Conférence des évêques du Centrafrique se veut direct. La responsabilité de cette situation repose principalement sur les “groupes armés” qui prétendent protéger la population : Les Selaka, anti-balaka… Une quinzaine en tout. Ils contrôlent les trois quarts du pays où ils “se comportent comme des prédateurs”, dénonce le cardinal. Ils se livrent aux exactions, aux massacres, et au racket, qui est un fléau quotidien. “Qu’avons-nous fait de notre pays ?”, se lamente-t-il. “Depuis des dizaines d’années, ce ne sont que mutineries, coups d’états, rebellions”.
“C’est un temps pour les vrais héros”
Personnage connu et apprécié pour son travail de réconciliation des communautés, Mgr Dieudonné Nzapalainga en appelle aux forces de l’ONU pour faire la lumière sur l’attaque du 1er mai. Il soupçonne en effet que les responsables de l’attaque ne soient pas des extrémistes religieux, mais simplement des membres de groupes armés désireux de maintenir le pays sous tension. Le gouvernement de Centrafrique tente en effet de désarmer les milices qui infestent le pays, et elles pourraient avoir intérêt à susciter des conflits, avant de proposer leur protection.
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Pour échapper à ce piège, le cardinal rappelle : “Aucun prêtre, aucun imam, n’a appelé à la violence contre une autre communauté”. Faire de ce conflit une affaire confessionnelle est un piège, le pays n’a pas besoin de défenseurs armés, mais de “vrais héros” : “C’est dans les moments comme ceux là que de vrais héros se lèvent et proposent une alternative, refusent la violence, choisissent le pardon”, conclut le cardinal.
Depuis la place Saint-Pierre, le pape François a appelé dimanche 6 mai à prier pour que les Centrafricains rejettent “la violence et la vengeance” après une semaine de tensions meurtrières. Faisant référence à sa visite en novembre 2015, il ajoutait : “J’invite à prier pour la population de la République centrafricaine, un pays que j’ai eu la joie de visiter et que je porte dans mon cœur”.
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