Pas de viande, bien entendu, mais aussi pas de graisse, d'œuf, ni de lait… En ce début de VIIe siècle, en plein Carême, un moine s'active devant son four à pain avec toutes ces strictes prescriptions alimentaires en tête. Et il parvient à cette étonnante innovation, un pain enroulé, qui prend la forme de bras croisés, les mains placés sur les épaules, selon une attitude de prière commune à cette époque.
C'est cette attitude qui aurait donné le nom à cette nouvelle pâtisserie, si l'on en croit l'auteur catholique américain Greg Dues, dans son livre Catholic Customs and Traditions. Il explique que de bracellae, "petits bras" en latin aurait dérivé le terme "bretzel" que nous connaissons. Les trois "trous" seraient un rappel de la sainte Trinité, et cette pâtisserie aurait, par la suite, été donnée en récompense aux enfants qui connaissaient bien le catéchisme.
Une fournée de légendes
Mais cette histoire de moine pâtissier du VIe siècle n'est que l'une des innombrables légendes qui courent sur l'origine des "bretzels". Selon une autre, très populaire, un boulanger, mis au cachot pour avoir fait brûler du pain, fut mis au défi d'inventer un pain "au travers duquel le soleil brillerait trois fois". S'inspirant de la position de la prière, il aurait inventé le "bretzel", en 1477. Évidemment, cette histoire paraît assez romancée, et inutilement compliquée !
Cette affaire d'origine de la pâtisserie est assez sérieuse pour que des archéologues se soient penchés dessus, et retrouve des bretzels — trop cuits — vieux de presque 300 ans ! Leur découverte a confirmé que la forme et les ingrédients n'ont pas varié jusqu'à nos jours. Une autre source permet de revenir plus loin dans le passé et d'écorner les deux légendes évoquées plus hauts. L'Hortus Deliciarum, un manuscrit réalisé entre 1159 et 1175 au couvent du mont Sainte-Odile par l’abbesse Herrade de Landsberg et ses moniales, représente clairement un bretzel. Exit, donc, la légende du boulanger du XVe siècle, il n'a pas pu l'inventer, puisqu'il existait déjà.
Le bretzel à l'épreuve de l'archéologie
Mais en se penchant sur la forme de la pâtisserie, on constate qu'elle ne respecte pas les fameux "bras en position de prière, les mains sur les épaules", évoquée par la légende du moine pâtissier, les bretzels sont plus enroulés que croisés. Pour trouver la forme croisée, il faut chercher plus tard, par exemple le dessus de la porte de l'ancienne boulangerie de l'hôpital civil de Strasbourg, qui porte une sculpture de bretzel datée de 1572… Quoi qu’il en soit, à défaut de pouvoir soutenir la véracité des légendes anciennes, on peut affirmer que le bretzel a tout de même un rapport direct avec le Carême.
Un bretzel de carême
C'est tout à fait clair dans un tableau de Brueghel l’Ancien, La lutte entre Carnaval et Carême, peint en 1559. Illustrant la transition entre Mardi Gras et le Mercredi des Cendres, il affiche les fameux bretzels à la suite du cortège du Mercredi. Et dans l'illustration évoquée précédemment, le manuscrit de L'Hortus Deliciarum, les bretzels partagent la table avec des poissons, prescrits pour les jours de jeûne.
Ces bretzels, sont apparemment nés d'un paradoxe : réaliser une pâtisserie agréable pour les jours où l'on doit se priver des plaisirs de la table. Mais ils ont la vertu de rappeler que le jeûne ne relève pas d'une volonté de se nuire, mais de se priver volontairement de quelque chose d'agréable, pour ne pas y montrer un attachement excessif. Accessoirement, cette attitude permet de retrouver le goût d'aliments aussi simples et bons que le pain et le sel !
Recette du Bretzel traditionnel
Avec le temps, le Bretzel s'est décliné sous une multitude de formes, impossibles à concilier avec les exigences du carême, on en trouve au fromage, glacés au sucre et même paraît-il aux Smarties… Pas de ça chez Aleteia, nous vous proposons la recette d'un Bretzel, le plus traditionnel qui soit.
Temps de préparation : 30 minutes auxquelles il faut ajouter 2h de temps de repos de la pâte, temps de cuisson : 8 à 10 minutes.