Le maire de Paray-le-Monial expose dans le hall de sa mairie une crèche en nacre offerte par le maire d'une commune de Palestine, avec laquelle sa ville est jumelée : Bethléem. Dans un contexte de laïcité chatouilleuse, le jumelage culturel entre les deux petites villes devrait pouvoir gommer les susceptibilités idéologiques. Mais l’initiative a un précédent douloureux.
Pour le quotidien local, Le Journal de Saône-et-Loire, il s'agit d'une « décoration religieuse ». Pour ce motif, le comité local de la Ligue des droits de l'homme avait attaqué l'année dernière le maire en justice car Jean-Marc Nesme avait déjà exposé une crèche venue de Bethléem à l’hôtel de ville. Réalisés en feutrine, les santons étaient l’œuvre de personnes handicapées de la cité où est né Jésus, il y a 2000 ans.
Le tribunal administratif de Dijon avait demandé la suspension de la décision du maire, le retrait de la crèche et le versement de 1000 euros à la Ligue des droits de l’homme. Jean-Marc Nesme s'était exécuté... le lendemain de Noël. En précisant qu’il paierait l’amende sur ses fonds personnels. Cela ne l’a pas empêché d’être attaqué devant les juges pour excès de pouvoir.
Cette année, le maire de Paray renouvelle l'opération, histoire de montrer aux habitants de Bethléem qu’il se trouve toujours des Français pour honorer leur amitié avec des peuples étrangers, y compris en bravant les idées reçues, et que l’un des meilleurs moyens de construire cette amitié est de nourrir une culture commune qui transcende les frontières.
« Une valeur culturelle »
On se souvient qu’en novembre 2016, le Conseil d’État avait déclaré que « dans les bâtiments publics, sièges d'une collectivité publique ou d'un service public, une crèche de Noël ne peut pas être installée, sauf si des circonstances particulières montrent que cette installation présente un caractère culturel, artistique ou festif ». C’est sur cet argument que Jean-Marc Nesme, qui n’est pas un débutant, s’était défendu. Maire depuis 1989, parlementaire pendant dix-huit ans, l’élu du Charolais est un juriste averti : « La crèche a une valeur culturelle. »
Aujourd’hui, il assume à nouveau : « C'est la suite de ce que j'avais fait l'année dernière, déclare-t-il au Journal de Saône-et-Loire. Ce n'est pas du tout une provocation. Puisque le second procès pour excès de pouvoir n'a toujours pas eu lieu, je considère que l'affaire n'a pas été jugée sur le fond. »
Le maire de la ville du Sacré-Cœur ne voit aucune atteinte à la laïcité dans son geste. « Je suis évidemment prêt à retourner au tribunal s'il le faut. Mes convictions n'ont pas changé », confirme Jean-Marc Nesme. Et s’il est à nouveau condamné ? « Je la ferai retirer le lendemain de Noël. »