Au Bangladesh, le pape François a donné sa feuille de route à une Église ultra minoritaire. Elle est valable également sous d’autres latitudes…La messe célébrée ce 1er décembre par le pape François dans un parc de Dacca, la capitale, avait un air de fête de famille. Par la simplicité des moyens d’abord : ici pas de sonorisation ni d’écrans vidéos à profusion, mais le minimum que pouvait s’offrir une Église de pauvres. Quant au podium pour abriter l’autel, nul besoin d’architecte, une simple paillote faisait l’affaire.
Pour autant, les quelque 100 000 fidèles – un tiers des catholiques du pays – n’avaient pas fait tant de route pour rien : non seulement ils ont vu le Pape, “leur chef”, venu les encourager dans leur foi, mais ils ont pu assister à l’ordination de seize prêtres. Pour le pape François, c’était même la première fois qu’il conférait le sacrement de l’ordre au cours d’un des 31 voyages, en cinq ans de pontificat.
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C’est dire l’importance accordée, pour le successeur de Pierre, à cet événement majeur de la vie de l’Église au Bangladesh. Ce que traduit ainsi un autre jésuite, bangladais celui-là, le père Georges : “Dans beaucoup de parties du monde, les vocations chutent… Ici, ces seize ordinations sont le signe que notre petite Église est vivante !”.
Pas de doute là-dessus, les périphéries de l’Église ont de la ressource. Il se pourrait même qu’elles aient quelques leçons à offrir aux vieilles chrétientés d’Europe, qui tendent elles aussi à devenir minoritaires. Résumons donc la feuille de route adressée par le pape aux catholiques du Bangladais…
1/ L’importance des prêtres, qui offrent par leurs mains le sacrifice du Christ. Les vocations sont “l’âme de l’évangélisation”, vient-il de déclarer dans un message pour un congrès sur le sujet en Italie. Mais lors de la messe au Bangladesh, le pontife a aussi ajouté, à l’attention des laïcs : “Ne vous fatiguez jamais de soutenir” les prêtres par votre prière. “C’est votre responsabilité !”, et faites-le avec un cœur généreux, a-t-il insisté.
2/ Le souci de la proximité avec les laïcs, qui incombe particulièrement aux évêques. Il s’agit de savoir prendre conseil auprès d’eux, pour ce qui concerne les affaires temporelles, la gestion des finances de l’Église, par exemple. Mais aussi de soutenir tous ceux qui exercent un apostolat dans les zones les plus éloignées de l’Église. Aujourd’hui, en France, cela fait beaucoup de travail à accomplir, dans tant de domaines de la vie professionnelle ou quotidienne…
3/ Le sens de la famille : c’est vrai pour le Bangladesh, mais cela devient vital pour des contrées plus individualistes comme en Europe. Le sens de l’hospitalité, le respect des parents et des grands-parents, des personnes âgées, des malades… Autant de marqueurs d’une civilisation chrétienne digne de ce nom. Des domaines où doit également s’illustrer l’action sociale de l’Église pour François !
4/ L’Église, elle aussi, est une grande famille. Le pape François a ainsi donné ce conseil judicieux aux évêques : renforcer les contacts entre les séminaristes et les prêtres âgés. Dans l’Église également, l’unité passe par le lien entre générations. Et quant aux évêques eux-mêmes, ils se doivent d’être les pères de leurs prêtres : “Ce sont vos frères, vos fils et collaborateurs dans la vigne du Seigneur”, a-t-il affirmé.
5/ La place essentielle de la vie religieuse, enfin. Le Pape argentin sait de quoi il parle, lui qui a été provincial des jésuites dans son pays d’origine. Les religieuses et les religieux sont une sorte de “troisième voie” dans l’Église, a indiqué le souverain pontife, non pas une voie de garage, mais au contraire leur contribution à la vie catholique est “fondamentale”.
Le prédécesseur du pape François, Benoît XVI, parlait jadis du rôle des “minorités créatives” pour ré-évangéliser l’Europe. Son successeur vient d’en préciser les contours.