Des milliers de chrétiens irakiens retournent sur leurs terres ancestrales, autour de Mossoul et dans la plaine de Ninive, mais de nouveaux affrontements menacent leur réinstallation.“Nous n’en espérions pas tant, il y a déjà un millier de familles chrétiennes qui sont revenues à Qaraqosh”, se réjouit auprès d’Aleteia Roger Kairallah, responsable des projets Moyen-Orient pour la Fondation Raoul Follereau. Il faut beaucoup de courage à ces chrétiens pour revenir dans leurs demeures, qui portent souvent les stigmates de quatre ans de guerre contre Daesh. Le clergé local, infatigable partisan de la présence chrétienne en Irak, collabore avec les associations humanitaires pour que leurs paroissiens retrouvent rapidement des conditions de vie décentes, du travail et des écoles.
Grâce à eux, l’université de Qaraqosh peut rouvrir ses portes, incitant la jeunesse à ne pas chercher un avenir ailleurs. “Nous participons à l’aménagement de quatre foyers à Qaraqosh pour les étudiants”, calcule Roger Kairallah. La Fondation Raoul Follereau participe aussi au réaménagement des chrétiens dans les villages de Baqofa et de Telkuf, dans la plaine de Ninive, mais là-bas, tous ses projets sont compromis.
Une nouvelle fuite
Mercredi 25 octobre, de violents accrochages opposaient l’armée irakienne et les peshmergas kurdes, justement dans les villages de Baqofa et de Telkuf. Une femme a été blessée dans les tirs croisés, ainsi que trois enfants qui jouaient au football. Les 700 familles chrétiennes qui rebâtissaient péniblement leurs maisons ravagées par Daesh ont dû fuir à nouveau. Les scènes ressemblent à celle de 2014 : des voitures surchargées, partant dans le désert, à la recherche d’un abri, qu’elles ont fini par trouver à Alqosh, un village chrétien situé plus au nord.
Un ennemi en chasse un autre
Daesh n’est pour rien dans ce nouveau malheur : les derniers combattants de l’État islamique sont à des centaines de kilomètres au sud-ouest, subissant un assaut conjoint des armées syriennes et irakiennes. Mais l’État irakien ne peut pas admettre que le Kurdistan irakien se déclare indépendant, à la suite du référendum du 25 septembre 2017. Dans ce nouveau conflit, les chrétiens sont une fois de plus pris entre deux feux, et redoutent de ne plus pouvoir retrouver de sécurité sur leurs terres.
C’est ce mot de “sécurité”, qui revient sans cesse dans les conversations avec les familles assyriennes, constate Roger Kairallah. Ils sont prêts à beaucoup de sacrifices pour re-labourer leurs champs, remettre en état les maisons et les terrains en friche, mais ils ont besoin d’être sûrs que leurs efforts ne seront pas vains. Ils craignent, légitimement, de devoir tout quitter, de vivre des années dans des camps de réfugiés, pour ne trouver à leur retour que des amas de ruines.
Le soutien des jeunes Assyriens combatifs
Pourtant, Roger Kairallah ne perd pas espoir car il est convaincu qu’Irakiens et Kurdes parviendront à s’entendre : “Tout le monde est fatigué de la guerre, il faudra bien qu’ils négocient”. Il constate aussi que de plus en plus de jeunes Assyriens se passionnent pour la culture de leur pays et font tout leur possible pour soutenir leur communauté. Parmi eux, Reven est un ingénieur trentenaire, qui parcourt avec des amis les villages de chrétiens. Aujourd’hui, ils font de l’aide d’urgence, distribuant des vivres et des couvertures à ceux qui ont dû fuir. “Ils sont d’un dévouement incroyable, et le fait de voir des jeunes comme eux donner autant de leur personne, encourage tout le monde”, conclut Roger Kairallah. Aujourd’hui, jeudi 26 octobre, il n’y a pas eu d’accrochage, et il espère que cela augure le meilleur pour la suite.