Alors que le président Rodrigo Duterte intensifie la répression contre les trafiquants de drogue, faisant chaque semaine des dizaines de morts, l’Église catholique appelle à l’apaisement. Après une semaine marquée par les violences dans la guerre contre la drogue menée par le président des Philippines Rodrigo Dutertre, le cardinal de Manille, Mgr Luis Tagle, a décidé ce dimanche 20 août d’appeler à l’apaisement. Le chef de l’influente Église catholique, à laquelle appartiennent 80% des habitants de l’archipel, soit plus de 80 millions de personnes, a demandé au gouvernement de mettre fin au « gâchis de vies humaines ». « Nous interpellons les consciences de ceux qui tuent jusqu’aux gens sans défense, en particulier ceux qui recouvrent leur visage de cagoules, pour leur demander d’arrêter de gâcher des vies humaines », a affirmé le cardinal dans un communiqué lu dans toutes les églises de la capitale pendant la messe. Selon lui, « le problème de la drogue illégale ne doit pas être réduit à un problème politique ou criminel. C’est un problème humanitaire qui nous concerne tous ».
Depuis son arrivée au pouvoir il y a 14 mois, le président Duterte a initié un programme très répressif contre le trafic de drogue qui a pris une ampleur sans précédent dans le pays. Lors de sa campagne, il avait annoncé son intention de supprimer des dizaines de milliers de consommateurs et de trafiquants de drogue, afin d’empêcher, selon ses propres mots que les Philippines se transforment en narco-État. Il avait alors largement remporté les élections en promettant de gagner sa guerre contre la drogue en six mois, objectif qui est encore loin d’être atteint. Il a alors intensifié la répression.
Une campagne baptisée « One Time Big Time », un nom qui semble banaliser la situation et qui fait référence à une séquence éponyme d’une ancienne émission télévisée, regardée à une époque par des dizaines de millions de Philippins pauvres. Dans cette séquence, sorte de « Roue de la fortune » à la philippine, les candidats pouvaient gagner d’énormes sommes d’argent.
Le lundi 14 août, la police philippine a annoncé avoir abattu 32 personnes et arrêté cent neuf suspects, lors d’une série d’opérations. Des chiffres qui avaient alors inquiété certains, comme Amnesty internationale. Durant le reste de la semaine, 44 personnes ont été tuées par les forces de l’ordre. Les défenseurs des droits et des parlementaires ont dénoncé « une série meurtrière alarmante ». Depuis l’élection du président Duterte est lourd. La police a confirmé avoir abattu, en état de « légitime défense », plus de 3 500 personnes qualifiées officiellement de « personnalités de la drogue », affirmant agir en état de légitime défense. Des inconnus ont tué au moins 2 000 suspects dans des affaires de drogue. Des milliers d’autres personnes ont été abattues dans des circonstances non élucidées, selon les chiffres des forces de l’ordre.
L’Église catholique, une des institutions les plus anciennes et les plus puissantes du pays est aujourd’hui l’une des seules voix philippines qui s’élèvent contre ces violences de l’État, alors que Duterte jouit d’une forte popularité.