Dans son ouvrage “Notre cœur n’était-il pas brûlant ?”, Jacques Gauthier développe un commentaire personnel des saintes Écritures. Ce livre est le passage en format de poche d’une première édition (2007) chez Parole et Silence, née du rassemblement de commentaires parus deux fois par mois pendant trois ans dans l’hebdomadaire Famille Chrétienne des trois lectures de la première partie de la messe des dimanches — Ancien Testament, épître, Évangile, lecture ecclésiale et liturgique de la Parole. En tout une soixantaine de chroniques.
Reprenant ces commentaires, plutôt que de suivre l’ordre du lectionnaire liturgique selon les années A, B et C, Jacques Gauthier a préféré un regroupement thématique : la Parole qui appelle, qui sauve, qui met en route, qui nourrit, qui prie, qui pardonne, qui questionne – sept ensembles auxquels s’ajoutent les témoins de la Parole : Isaïe, Marie, Jean-Baptiste ; Simon Pierre ; Michel, Gabriel et Raphaël ; la Sainte Famille ; la fête de tous les saints ; saint Joseph ; Marie en son Assomption.
Jacques Gauthier a toujours le souci de souligner la cohérence et la complémentarité des trois textes du dimanche. Après quoi, il lui appartient de faire choix d’un thème, d’un aspect, d’un fait, d’un geste, d’une parole, pour passer du commentaire à ce qui est proprement une prédication, ou du moins son amorce. Non pas “sermon”, mais homélie, entretien familier d’après Jacques Gauthier : verbe simple, direct, personnel, expression de sa vie de foi et de prière, en famille en particulier ; verbe enrichi par une étroite intimité avec l’Écriture, par une fréquentation des poètes spirituels, son cher La Tour du Pin, dès l’épigraphe, Marie Noël, Félix Leclerc (« C’est grand la mort, c’est plein de vie dedans »), Gustave Thibon, et bien d’autres ; verbe plein de ferveur – ce beau mot exprime l’adjectif brûlant du titre —, chaleur de joie, jubilation née de ce travail d’appropriation de la Parole.
Dans la lignée des sermons de Bossuet
Chaque lecteur trouvera son bien. Certaines pages solliciteront son esprit, et même son imagination, comme les deux contes de la Nativité (p. 141) et de l’Épiphanie (p. 57). D’autres toucheront son cœur. Quelques-unes, par le mystère de la communion des saints, iront jusqu’à l’âme. Et parfois tout cela à la fois, comme ces méditations sur le Kyrie eleison, le Notre Père ou Amen.
S’il m’est permis d’ajouter un mot plus personnel, lisant Jacques Gauthier, je me suis retrouvé dans le droit fil des sermons de Bossuet sur le mystère de la prédication (Sermon sur la Parole de Dieu, prêché aux Grandes-Carmélites le 3 mars 1661, Sermon sur la prédication évangélique, Carême du Louvre, dimanche 26 février 1662 – dont la première phrase retentit aujourd’hui comme jamais : « C’est une chose surprenante que ce grand silence de Dieu parmi les désordres du genre humain »). Droit fil parce que les leçons de Bossuet, qu’il tenait lui-même de saint Augustin et de Vincent de Paul, inspirent et imprègnent le travail de Jacques Gauthier. La première c’est que « on parle dans la chaire, la prédication se fait dans le cœur » : l’orateur sacré ne fait que prêter sa voix au Maître, qui est l’Esprit. La seconde c’est que « ce sont les auditeurs fidèles qui font la prédication évangélique ». Jacques Gauthier : « Quel est notre désir de la Parole ? (…) Il faut tout mettre en œuvre pour que nous soyons davantage au service et à l’écoute de la Parole. » C’est tout le sens de ce beau livre.
Notre cœur n’était-il pas brûlant ? de Jacques Gauthier. Parole et Silence, 192 pages, 11 euros.