Alors que deux projets de résolution sont à l’étude à l’ONU, l’Église dresse un terrible bilan des violences dans ses circonscriptions du Grand Kasaï. Les victimes des violences au sein des circonscriptions ecclésiastiques du Grand Kasaï, en République démocratique du Congo, enregistrées d’octobre dernier à ce jour sont au nombre de 3 383, rapporte la nonciature apostolique à Kinshasa dans une note parvenue à l’agence Fides. Depuis octobre 2016, ont été découvertes une trentaine de fosses communes. Une vingtaine de villages ont été complètement détruits sous les feux des combattants de l’armée congolaise (FARDC) et les miliciens du chef coutumier Kamwina Nsapu – grand contestataire de l’autorité de l’État, tué en août dernier dans une opération de police – engagés dans des affrontements « d’une atrocité inimaginable », avait dénoncé l’évêque de Luiza, Mgr Félicien Mwanama Galumbulula, en février dernier.
L’Église elle-même a payé un lourd tribut de ces violences : 60 paroisses et 34 maisons religieuses fermées ou endommagées en quelques mois, ainsi qu’une trentaine de structures sanitaires et 141 écoles catholiques, rapporte la nonciature apostolique. Cinq séminaires, dont deux grands séminaires, ont également été contraints à la fermeture, comme le grand séminaire de Malole de Kananga qui a été assailli et saccagé par des miliciens avant d’être délogés par les forces de l’ordre.
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Deux évêques ont été contraints à l’exil. Il s’agit donc de l’évêque de Luiza et celui de Luebo, Mgr Pierre-Célestin Tshitoko Mamba. Les deux diocèses particulièrement secoués par ces violences. Le dossier, informe l’agence Fides, a été envoyé aux autorités congolaises et aux représentations diplomatiques présentes à Kinshasa.
Message des évêques
Dans un message, au terme de leur assemblée plénière, début juin, les évêques de la province ecclésiastique de Bukavu, ont dénoncé une “prolifération” des milices armées et de “leurs revendications identitaires” un peu partout dans les provinces, ramenant au jour de vieux conflits tribaux. Ils notent en particulier les « retombées néfastes du phénomène Kamuina Nsapu » jusque dans la province du Maniema, sur le territoire de la province ecclésiastique de Bukavu, contaminée à son tour par “le réflexe de l’exclusion de l’autre et de la discrimination”, rapporte une autre dépêche récente de Fides. À cette occasion, les évêques ont fait mémoire de Sœur Clara Agano, des Sœurs franciscaines scolastiques de Christ Roi, tuée le 29 novembre 2016 en la paroisse Mater Dei de Bukavu et de différents prêtres et missionnaires enlevés l’an dernier pour en obtenir une rançon.
Une enquête qui ne vient toujours pas
Les évêques imputent cette situation au manque d’autorité de l’État, une constante depuis des décennies mais qui tendrait à s’aggraver. Des enquêteurs internationaux se rendront-ils au Kasaï ? C’est la grande incertitude du jour à l’Onu. Des discussions sont actuellement en cours autour de deux projets de résolution, l’un soutenu par les pays africains, l’autre par les pays européens. Un compromis entre les deux projets serait difficile à trouver, rapporte RFI Afrique. Les États européens souhaitent une condamnation très forte de toute incitation à la violence ethnique et des violations des droits de l’homme commises dans les Kasaï depuis août 2016. Les pays africains réclament quant à eux une assistance logistique et matérielle du bureau des droits de l’homme à Kinshasa aux autorités congolaises dans leurs enquêtes sur le terrain.