D’une ruine, les habitants de Lanvern, en pays Bigouden (29), ont fait renaître une chapelle merveilleuse. L’été prochain, de nouveaux vitraux vont y être installés.La chapelle Saint-Philibert de Lanvern en Finistère a connu bien des déboires depuis sa construction au sein d’un prieuré dépendant de l’abbaye de Landévennec au XIe siècle. Agrandie et embellie au XIIIe et XIVe, lorsqu’elle devint église paroissiale, son clocher fut décapité en 1675 lors de la répression du duc de Chaulnes, gouverneur de Bretagne, contre les Bonnets Rouges. Bien que classée en 1926, sa toiture s’effondra après la Seconde Guerre mondiale. Envahie par la végétation, ne restaient plus que les murs, le demi clocher et une superbe rosace gothique, véritable dentelle de granit. Dans les années 1970, des premiers travaux de sauvegarde, réalisés l’été par une troupe de scouts, sauvèrent les murs. Puis, une association du quartier de Lanvern fut créée en 1984, réanimant les lieux par un pardon et une fête champêtre annuelle devenue un rendez vous incontournable, tout comme le bistro de Milou où se tenaient les réunions de l’association. À la mort de ce dernier, la commune eut la surprise d’hériter de ses biens – considérables – à condition de restaurer cette fameuse chapelle ! Une première étape fut réalisée en 2011 en lui refaisant une toiture. En juillet, pour le prochain pardon, on pourra admirer les nouveaux vitraux créés par Jacques Godin, peintre et maitre verrier du pays.
Graphisme et couleurs au service de la beauté
Jacques Godin connaissait particulièrement bien les lieux car son arrière grand père y était maréchal ferrant. L’artiste, ayant son atelier à une dizaine de kilomètres de là, a déjà à son actif un certain nombre de vitraux réalisés en collaboration avec l’atelier Charles Robert de Pluguffan (29), dont ceux de la chapelle voisine de Beuzec-en-Plomeur et surtout la maitresse vitre de l’église de Saint-Trémeur de Carhaix, haute de plus de 15 mètres ! Ici, il a voulu traduire cette atmosphère de paix, de sérénité et de douceur qui imprègne l’ensemble de l’édifice. Pour cela, il a opté pour des formes abstraites fluides, des rythmes graphiques et des rapports de couleurs afin de créer cette ambiance propice au recueillement de la foi comme à la contemplation profane pour que ceux qui les regardent s’émerveillent et voient dans la beauté, une lueur d’espérance.
Des vitraux comme une partition musicale
Guidé par l’architecture et l’environnement des lieux, il s’est orienté vers un hymne à la nature évoqué par les quatre saisons en résonnance avec les Évangiles. Grand amateur de musique sacrée, il a conçu l’ensemble comme une partition musicale, un paysage sonore qui s’écoute au rythme des saisons et fait chanter la lumière telle une mélopée de l’âme. Il a emprunté au répertoire du chœur, dans lequel il chante, des titres en harmonie avec les thèmes de chaque fenêtre. Ainsi la fenêtre du transept nord évoquant les saisons froides reprend le titre de « O Solitude » de Purcell alors que la fenêtre sud rappelle les saisons chaudes et l’« Allelluia » de Haendel. Elles viennent en écho répondre à la Maîtresse-vitre, qui évoque un « Te Deum » grégorien. Les lancettes et la rose de cette dernière symbolisent les quatre évangélistes et les Passions de Bach, tandis que les quatre trilobes qui les surmontent sont associés aux vertus cardinales – justice, prudence, tempérance et force – du concert céleste, et au « Gloria » de Mozart.
Encore à l’état de cartons dans l’atelier de l’artiste, cette virtuose composition de couleurs et de lumière sera installée avant l’été grâce à la collaboration du maitre verrier Frédéric Robert. Le pardon et la fête champêtre de Juillet, qui rassemble chaque année les amoureux des lieux comme les entreprenants adhérents de l’association du quartier de Lanvern, permettra de découvrir ces vitraux conçus comme une intercession entre le ciel et la terre et résultats d’une exceptionnelle histoire de convivialité entre les hommes. Le souvenir du généreux donateur et les activités associatives ont fait des miracles !