Semaine très politique : aux États-Unis, les adieux d’Obama et le face à face de Trump avec la presse ; en France, la rentrée de François Fillon, et le premier débat de la primaire à gauche.
Coqueluche des médias et du showbiz outre-Atlantique, Barack Obama « s’est adressé mardi [9 janvier] pour la dernière fois à l’Amérique et au monde, dans un discours qui fut à la fois un adieu ému et un appel à la vigilance » note Le JDD : « Par moment troublé — il a écrasé une larme en rendant un hommage appuyé à sa femme —, le 44e président des États-Unis, qui s’apprête à céder la place à l’homme d’affaires Donald Trump, a aussi exhorté les Américains à être des acteurs du processus démocratique. » Au cours de cet ultime discours comme président, prononcé à Chicago, Barack Obama n’a « jamais cité le nom de son successeur Donald Trump ».
« Barack Obama s’est concentré sur les réussites de son administration, rapporte RFI : la nette amélioration de l’économie américaine, le dégel avec Cuba, l’accord sur le nucléaire avec l’Iran, la mort de Ben Laden et Obamacare, ce système de couverture médical qui permet aujourd’hui à 20 millions d’Américains de bénéficier d’une assurance maladie. Un des programmes qui devrait être démantelé par la prochaine administration » … avec l’accord des millions d’Américains des classes moyennes qui ont voté pour Trump, jugeant l’addition trop salée pour le résultat.
Trump fait du Trump
Le lendemain, 11 janvier, à New York, dans la Trump Tower, le président élu (mais pas encore intronisé) Donald Trump, bête noire des médias, faisait face aux journalistes pour la première fois depuis son élection. Il a fait du Trump dans un « contexte tendu », relève le Huffington Post, « après la publication de documents potentiellement explosifs détenus par Moscou. Plusieurs médias américains affirment que les chefs du renseignement américain ont informé Donald Trump de l’existence de dossiers compromettants pour lui (…) afin d’éventuellement le faire chanter. Et le président élu a abordé ces questions dès les premières minutes de son allocution. “Ces informations ont peut-être été divulguées par les services secrets. Ce serait un énorme déshonneur.” »
« Donald Trump a admis que la Russie est à l’origine des piratages informatiques du parti démocrate pendant la campagne présidentielle » constate Le Parisien. « Mais il a vigoureusement rejeté la publication d’un document de 35 pages par des médias américains, contenant des informations non vérifiées sur des dossiers potentiellement compromettants sur lui. (…) “Ce sont des fausses informations. C’est bidon. Ça n’est jamais arrivé”, a-t-il ajouté. (…) “Si le président Poutine m’apprécie c’est un atout. La Russie peut nous aider à combattre le groupe État islamique”, a fait valoir Donald Trump. Il a toutefois laissé filtrer une critique du président russe pour son rôle supposé dans le piratage du parti démocrate. » Tout en pointant les faiblesses de l’administration Obama face aux cyberattaques, avant d’annoncer « un rapport pour lutter contre ce phénomène nouveau. » Toujours sans complexe, il a proclamé qu’il serait « le plus grand créateur d’emplois que Dieu ait jamais créé », et annoncé qu’il avait cédé ses entreprises à ses deux fils pour éviter tout conflit d’intérêts, appelant à la rescousse pour la démonstration son avocate fiscaliste.
« Multiplication des emplois sur le sol américain (quitte à forcer la main aux multinationales), remise en cause de l’Obamacare, dénonciation du coût élevé de l’avion militaire F-35, mur entre l’oncle Sam et le Mexique… Le futur président des États-Unis confirme de nombreux éléments de son programme » résume Capital.
Le retour de François Fillon
En France, la semaine fut marquée par le retour de François Fillon sur la scène politique avec ses vœux à la presse et aux parlementaires le 10 janvier. Le candidat de la droite et du centre à l’élection présidentielle s’est érigé en représentant d’un « peuple qui se remet à l’offensive », mu par « une volonté de changement que les élites sous-estiment ». Mais s’il séduit sur l’insécurité, les flux migratoires, le péril islamique, ses propositions de réforme économique passent mal auprès des classes moyennes et populaires. « Attaqué par la gauche et le FN depuis sa victoire à la primaire de la droite, sur ses propositions sur la Sécurité sociale, François Fillon les avait retirées, quinze jours plus tard, de son site de campagne » rappelle la chaîne parlementaire Public Sénat. Il a annoncé le 11 janvier sur RMC BFMTV qu’il modifierait son projet dans les semaines à venir : « On n’a pas été bons, on n’a pas été clairs dans nos propositions », a reconnu l’ancien Premier ministre en annonçant qu’il avait lancé « un débat avec l’ensemble des responsables de la santé, les médecins ».
S’agissant de l’économie qui est au cœur des réformes qu’il propose, « Fillon n’a pas trouvé l’équivalent du travailler plus pour gagner plus » [de Sarkozy], estime Jérôme Fourquet, de l’Ifop, interviewé par Le Point : « Il lui manque encore un discours en direction de la France qui travaille dur et doit être récompensée. Sans cela, c’est illusoire de penser séduire les catégories populaires. Il vient de perdre huit points chez les employés et les ouvriers, il tombe à 11 %, ce qui est un score excessivement bas. » Les sarkozystes en profitent pour donner de la voix, souligne Libération : « La semaine dernière, c’était l’ancien porte-parole Gérald Darmanin qui jugeait impossible de ne pas payer pour leurs 39 heures hebdomadaires les fonctionnaires qui auront vu augmenter leur temps de travail. Ce mercredi, c’est au tour de Laurent Wauquiez, autre ex-pilier de l’équipe de Sarkozy, de contester le programme du vainqueur de la primaire. Plutôt que de promettre «du sang et des larmes », le candidat devrait, « lancer un signal à la France qui travaille ». Comment ? Par exemple en restaurant, comme le prévoyait Sarkozy, la défiscalisation des heures supplémentaires a suggéré sur RTL le président LR de la région Auvergne Rhône Alpes. Brice Hortefeux (…) Cela n’a « aucun sens », a répliqué Fillon au micro de RMC, très agacé de voir ses « amis » reprendre les critiques de la gauche. Ce qu’il veut, lui, c’est que « le salaire direct des Français augmente ». Et pour rendre cela possible, il faut commencer par « baisser la dépense publique ».
Le premier débat de la primaire à gauche
Les sept candidats de la primaire à gauche ont entamé jeudi 12 janvier une série de trois débats télévisés en huit jours : un vrai marathon ! Dans le lot se détachent ceux que Le Monde présente comme « les quatre enfants terribles du Parti socialiste [qui] se disputent la succession de François Hollande, après avoir tué, politiquement et symboliquement, le « père » : Benoît Hamon (49 ans), Arnaud Montebourg (54 ans), Vincent Peillon (56 ans) et Manuel Valls (54 ans).
La soirée n’a pas fait recette, remarque L’Express : « Cette première confrontation — organisée par TF1, RTL et L’Obs, en partenariat avec LCI et Public Sénat — a rassemblé 3,8 millions de téléspectateurs, soit 18,3% de part d’audience. Le score enregistré est à peine supérieur à celui de la série Limitless, diffusée en même temps sur M6, qui a séduit 3,6 millions de fans pour la première heure. L’audience est aussi nettement inférieure à celle du premier débat de la primaire à droite. En octobre, les sept candidats avaient rassemblé 5,6 millions de téléspectateurs sur TF1, soit 26,3% de part d’audience. Un succès. »
Plus sévère encore, Le Point juge la soirée « soporifique » et constate que l’avis est partagé par la plupart des éditorialistes. Il y avait pourtant des désaccords de fond entre ceux que Hubert Coudurier du Télégramme appelle « les partisans de raser gratis et ceux qui veulent maintenir les grands équilibres. Entre Hamon et Bennahmias, favorables à un revenu universel au montant astronomique, 400 milliards d’euros (soit les deux tiers des transferts sociaux) (…) et Valls, Montebourg et Peillon, conscients que l’actuel président n’a pas seulement payé la hausse du chômage mais aussi celle des impôts. » « Tout cela ronronnait, observe Bernard Stéphan, dans La Montagne, « jusqu’au moment où la loi travail est venue comme le grand contentieux du quinquennat. Benoît Hamon et Arnaud Montebourg ont sonné la charge en dressant implicitement le procès de Manuel Valls sur ce dossier. Là, on venait sur le bilan et sur le vrai clivage qui traverse le PS. On était au cœur du débat, celui qui va peser sur le choix des électeurs de gauche. »
Jugeant lui aussi ce débat « fastidieux », Le Figaro observe que « pour les socialistes (…) ce premier grand oral était donc surtout l’occasion d’affirmer un positionnement. Rempart de la droite et de l’extrême droite pour Manuel Valls, héraut de la gauche pour Vincent Peillon, futur président “de la volonté et du courage” pour Arnaud Montebourg et enfin candidat du renouveau pour Benoît Hamon. »
Macron à l’aune du phénomène Trump
Loin devant dans les sondages à gauche, (l’un respectivement 39% et 32% de bonnes opinions selon une enquête pour Le Figaro Magazine), Emmanuel Macron et Jean-Luc Mélenchon n’ont cure de cette primaire. Ils attirent à eux toute la lumière. « Pourquoi Emmanuel Macron a-t-il le vent en poupe ? Pour trouver une explication, il faudrait se pencher sur la percée réussie de Donald Trump » assure au JDD Arnaud Mercier, professeur en Information-Communication à l’Institut Français de presse. Pour lui, « Emmanuel Macron peut réussir même sans parti, ni sans jamais avoir été élu. » Sa réussite ne serait pas moins surprenante que celle de Trump mais « ce n’est pas parce que des choses sont dures à croire (…) qu’elles sont forcément fausses. Ce n’est pas parce qu’on juge une situation ou des jugements absurdes qu’il faut les considérer comme non pertinents, et donc les rejeter. Tous ceux qui ont pensé le phénomène Trump à l’aune de leur propre système de valeurs en ont fait l’amère expérience. (…) cette personnalité, avec ses outrances, ses incohérences, ses positionnements transgressifs a pu incarner pour bon nombre d’Américains une alternative, une façon divergente d’aborder la politique. » Tout ancien banquier et ancien ministre des finances de François Hollande qu’il soit. Quoi qu’il en soit, « Macron effraie la gauche comme la droite » constate RTL.
Mélenchon se dédouble !
Quant à Mélenchon, sans doute pour être encore plus « effrayant » que Macron, il a choisi…de se dédoubler, annonce Paris Match ! « Fasciné par le progrès technique sous ses multiples formes, Jean-Luc Mélenchon va tenter un exercice inédit pour un de ses prochains meetings. Le candidat de la France insoumise sera à Lyon le 5 février, pour faire pièce à Marine Le Pen, également présente ce jour-là. (…) Cette réunion publique classique sera doublée d’une autre à Paris, où le candidat sera présent… sous forme d’hologramme. » Là, pas de doute, ça fait peur !