Alors qu’est sortie mercredi 12 janvier la version colorisée du premier album de Tintin, Aleteia tente un parallèle entre deux auteurs qu’a priori rien ne semble rapprocher. Partons à la rencontre de deux auteurs que rien ne semblait lier et que l’ardeur pour la défense de la vérité a rendu frères au-delà des kilomètres et des chemins jamais croisés : Georges Rémi, dit Hergé, célèbre père de Tintin et Milou, et Alexandre Soljenitsyne, romancier, prisonnier des goulags, homme de lettres aux vertus qu’on ne compte plus.
2017 compte deux anniversaires marquants pour ces hommes : Hergé aurait eu 110 ans cette année, tandis que l’œuvre légendaire du vieux russe, L’Archipel du Goulag, est maintenant achevée depuis tout juste 50 ans.
Hergé ou l’art de la provocation ?
On oublie souvent les accusations de fascisme qui pèsent sur le dessinateur le plus aimé des enfants épris de bande dessinée et d’aventure. Elles sont pourtant réelles et en grande partie dûes à son amitié notoire avec Léon Degrelle. Malmené par le monde moderne lui reprochant le racisme de certaines de ses bulles, Hergé n’avait pas pour ambition de défrayer la chronique à tout prix. La provocation l’amusait bel et bien cependant, car il ne considérait pas la bande dessinée comme un divertissement pascalien. Son art était l’Hermès de ses convictions profondes, et c’est ce qu’il a prouvé avec la toute première aventure de Tintin, qui se rendait au pays des soviets, dans l’URSS des goulags et des Rouges. S’il ne s’y est jamais rendu, il emprunte grassement les anecdotes de l’ouvrage de Joseph Douillet, Moscou sans voiles. On y retrouve en récit ce que la bande dessinée met en image : la fausse usine de propagande par exemple, qui ne fonctionne que pour impressionner l’Occident et prétendre à une certaine prospérité économique.
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Soljenitsyne, la dignité face à la déshumanisation du communisme
Après avoir combattu sur le front en 1941 pour défendre sa tendre Russie, celle-ci viendra saper l’affection de son fils par la censure et les goulags. Une malheureuse correspondance qui dépréciait le régime en place durant la guerre mérita au jeune officier Alexandre huit années de goulag. Durant ces huit années, il lutte pour conserver la qualité d’homme que le communisme de Staline retire aux hommes qu’il emprisonne. Il commence par refuser de se jeter sur la nourriture à mains nues, instaure malgré le froid et la famine la dignité dans les choses les plus simples, et finit sa quête de l’excellence dans ces lieux sordides par la rédaction, dans sa mémoire uniquement, des ouvrages qu’il publiera à sa sortie. Une âme belle, une volonté de fer, une patience incroyable, Alexandre Soljenitsyne est un modèle de persévérance, d’exigence et de recherche d’excellence tristement négligé par la jeunesse de notre siècle.
Ce qui unit ces deux hommes de la Belgique à la Russie, c’est en quelque sorte l’encyclique Divini Redemptoris du pape Pie XI : « Ce péril si menaçant. Vous l’avez déjà compris, Vénérables Frères, c’est le communisme bolchevique et athée, qui prétend renverser l’ordre social et saper jusque dans ses fondements la civilisation chrétienne. » Il y dénonce le communisme comme « intrinsèquement pervers ». Si les deux auteurs ne sont pas particulièrement pratiquants, ils n’en partagent pas moins cet avis : Soljenitsyne pour avoir vu la barbarie du communisme, et Hergé pour son âme toujours illuminée par le scoutisme de son enfance.