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Quand Louis XIV voulait émerveiller la cour, le royaume et l’Europe

Slodtz Paul Ambroise (1702-1758) Slodtz Sébastien-Antoine (1695-1754) © Château de Versailles, Dist. RMN-Grand Palais / Christophe Fouin

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Caroline Becker - publié le 09/01/17
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Découvrez les fêtes et divertissements à la cour de Versailles jusqu’au 26 mars 2017.

En monarque politique, le roi Louis XIV a su porter au faîte de sa magnificence le « grand divertissement » faisant de Versailles un lieu de fêtes et de spectacles pour toujours plus de grandeur, d’extraordinaire et de fantastique. En fin psychologue, il a compris que « cette société de plaisirs, qui donne aux personnes de la cour une honnête familiarité avec (le souverain), les touche et les charme plus qu’on ne peut dire » est nécessaire au cadre politique qu’il a instauré. Il faut, pour l’ordinaire de la vie de cour, de nombreux divertissements. Il faut, pour l’extraordinaire, des événements royaux pour étonner et émerveiller à la fois, la cour, le royaume et l’Europe.

L’exposition, en parcourant trois règnes, de Louis XIV à la Révolution, prétend ainsi montrer les infinies variétés de divertissements proposés à la cour, qu’ils soient offerts par le roi ou qu’ils soient pratiqués par elle. Ce sont, tout d’abord, les spectacles publics, comédies, opéras, concerts, feux et illuminations, mais aussi les représentations privées quand seigneurs et dames de cour deviennent eux-mêmes acteurs ou musiciens. Ce sont les innombrables jeux d’argent qui apportent la fortune ou la ruine. Ce sont les exercices du corps, où il faut briller : la chasse, la danse des bals et des mascarades, le mail et la paume.

Vue de l'exposition © Château de Versailles, Didier Saunier.

Vue de l’exposition © Château de Versailles, Didier Saunier.
Vue de l’exposition © Château de Versailles, Didier Saunier.

 Une plongée au coeur des divertissements 

Face à un sujet si ample, la scénographie se devait de plonger le visiteur dans une succession d’ambiances d’extérieur ou d’intérieur, de cohue ou d’intime, de calme ou de bruit … Aussi les volumes sont-ils successivement ouverts ou plus resserrés, la lumière éclatante ou tamisée, les sons diversifiés pour évoquer tantôt une fanfare, tantôt un concert, tantôt une chorégraphie de danse.

Versailles est né de la chasse

Pour la chasse, l’espace est celui d’une clairière, lieu de rendez-vous et de départ et les cimaises, tapissées d’un fond naturel, donnent l’illusion de la vitesse et des cavalcades dans les sous-bois. Chiens, costumes et accessoires de chasse font écho au décor des trois grandes tapisseries des chasses royales commandées par Louis XV aux Gobelins.

Vue de l'exposition © Château de Versailles, Didier Saunier.

Vue de l’exposition © Château de Versailles, Didier Saunier.
Vue de l’exposition © Château de Versailles, Didier Saunier.

Les carrousels spectaculaires

Plus loin, l’univers des ballets équestres des carrousels revit avec le grand visuel reproduisant l’un des carrousels de Monseigneur dans la cour de la Grande Écurie. Le carrousel, qui a remplacé le tournoi interdit depuis la mort d’Henri II, connut un immense succès mais cette forme de ballet fut vouée à disparaître en raison des luxueux harnachements qui entraînaient les seigneurs de la cour à des dépenses exorbitantes.

Ou le Pompeux Carrousel des galantes amazones des quatre parties du monde Donné à Versailles dans la cour d’Honneur de la Grande Écurie, les 28 et 29 mai 1686 Attribué à Jean-Baptiste Martin l’Aîné 1686 ? Château de Versailles © RMN-Grand Palais (Château de Versailles) / Philipp Bernard

Ou le Pompeux Carrousel des galantes amazones des quatre parties du monde Donné à Versailles dans la cour d’Honneur de la Grande Écurie, les 28 et 29 mai 1686 Attribué à Jean-Baptiste Martin l’Aîné 1686 ? Château de Versailles © RMN-Grand Palais (Château de Versailles) / Philipp Bernard
Ou le Pompeux Carrousel des galantes amazones des quatre parties du monde

Les lieux du divertissement

Vient ensuite les lieux du divertissement : tout Versailles, Marly, le Trianon…devient la scène de différents spectacles. Les scènes sont à la fois le parc et les appartements royaux que l’on aménage de façon provisoire ou durable, jusqu’à la construction de l’Opéra royal en 1770 (achevé à l’occasion du mariage du dauphin, futur Louis XVI, avec Marie-Antoinette).

Le sublime remontage du décor de scène du Temple de Minerve, éclairé avec la même densité qu’à l’époque, nous introduit immédiatement dans l’ambiance des spectacles. Le visiteur peut monter sur scène pour voir l’envers du décor. Conçu à l’italienne, ce décor est le plus ancien au monde et nous est parvenu, par chance, presque intégralement intact. À l’origine, il fut créé en 1754 pour le château de Fontainebleau pour une reprise de Thésée, tragédie lyrique de Quinault, mis en musique par Lully. Une merveille à ne pas manquer !

Slodtz Paul Ambroise (1702-1758) Slodtz Sébastien-Antoine (1695-1754) © Château de Versailles, Dist. RMN-Grand Palais / Christophe Fouin

Slodtz Paul Ambroise (1702-1758) Slodtz Sébastien-Antoine (1695-1754) © Château de Versailles, Dist. RMN-Grand Palais / Christophe Fouin
Slodtz Paul Ambroise (1702-1758)

À la Comédie

En temps ordinaire à Versailles, le théâtre constitue une distraction qui se tient à jours fixes dans la semaine et à laquelle participent quelques centaines de courtisans. Le répertoire joué est très large, qu’il s’agisse de reprises ou de nouvelles créations : comédie italienne ou française, opéras ou opéras ballets, tragédies classiques

Parallèlement aux représentations de l’ordinaire, se développe une autre forme de théâtre sous la houlette de la duchesse de Bourgogne, puis de la marquise de Pompadour, avec le théâtre des Petits Appartements logé dans le grand escalier des Ambassadeurs avant sa démolition et enfin, sous l’impulsion de la reine Marie-Antoinette au théâtre du Petit Trianon. Il s’agit du théâtre de société, plus intime, joué dans un cercle plus choisi et devant lequel il arrive que la famille royale se produise elle-même sur scène.

Pour les grands divertissements offerts à l’ensemble de la Cour par Louis XIV, les représentations ont parfois eu lieu à l’extérieur, dans la cour de Marbre, ou dans les jardins dans lesquels étaient aménagées des salles éphémères capables d’accueillir une foule de spectateurs.

Jean-Michel Moreau dit « le Jeune » (1741-1814) Dessin, plume et encre de Chine Mai 1770 Château de Versailles © Château de Versailles, Dist. RMN-Grand Palais / Jean-Marc Manaï

Jean-Michel Moreau dit « le Jeune » (1741-1814) Dessin, plume et encre de Chine Mai 1770 Château de Versailles © Château de Versailles, Dist. RMN-Grand Palais / Jean-Marc Manaï
Jean-Michel Moreau dit « le Jeune » (1741-1814)

Au concert

Comment parler de Versailles sans évoquer la musique qui est y omniprésente. La musique accompagne la plupart des autres formes de divertissements : de la chasse aux bals en passant par les comédies-ballets ou les opéras et le théâtre. Mais c’est aussi un divertissement à part entière et ce ne sont pas les occasions qui manquent à la cour pour qui veut écouter de la musique.

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Madame Henriette de France (1727-1752) jouant de la basse de viole, Nattier Jean-Marc (1685-1766) Huile sur toile, 1754 © RMN-Grand Palais (Château de Versailles) / Christophe Fouin

La reine Marie Leszczynska initie ainsi les concerts de la Reine tandis que la dauphine Marie-Josèphe de Saxe, en musicienne formée et avertie, reprend le flambeau ; il en ressort une programmation riche et variée, témoignage du rôle discret mais réel des souveraines et des princesses dans l’art à Versailles. Et si la volonté royale est si directement présente dans ce domaine, c’est parce que les membres de la famille royale sont eux-mêmes musiciens : Louis XIV aime jouer du luth et de la guitare, les filles de Louis XV sont des musiciennes confirmées, et Marie-Antoinette pratique la harpe.

Madame Adelaïde de France (1732-1800), fille de Louis XV Nattier Jean-Marc (1685-1766)Versailles, Huile sur toile, 1758 © RMN-Grand Palais (Château de Versailles) / Christophe Fouin

Madame Henriette de France (1727-1752) jouant de la basse de viole Nattier Jean-Marc (1685-1766) Huile sur toile, 1754 © RMN-Grand Palais (Château de Versailles) / Christophe Fouin
Madame Adelaïde de France (1732-1800), fille de Louis XV

La promenade

Il ne faut pas oublier les divertissements d’extérieur ! Les promenades à pied ou en calèche, les parties de pêche aux bords des bassins, les déambulations bucoliques dans le jardin de Trianon… Ces temps rythment la vie de Cour selon une étiquette variable. Si Marly est le royaume par excellence des jeux de plein air avec la ramasse (sorte de luge rapide) et l’escarpolette (un type de balançoire), Versailles propose le mail, ancêtre du golf. Les courtisans peuvent également jouer à la paume en extérieur ou en salle. Les plaisirs des jeux d’eau se déclinent en promenades en gondole sur le Grand Canal et la pièce d’eau des Suisses. Les joies du plein-air sont aussi affaire de saison : on y pratique alors le patinage sur le Grand Canal gelé ou des courses de traîneaux dans la neige.

Petite calèche du dauphin Louis Charles de France, futur Louis XVII (1785-1795) Anonyme Vers 1785-1789 Bois sculpté, peint et doré, bronze ciselé et doré, métal (fer) peint et doré et garniture en cuir rouge (XIXe siècle), Château de Versailles © RMN-Grand Palais (Château de Versailles) / Gérard Blot

Petite calèche du dauphin Louis Charles de France, futur Louis XVII (1785-1795) Anonyme Vers 1785-1789 Bois sculpté, peint et doré, bronze ciselé et doré, métal (fer) peint et doré et garniture en cuir rouge (XIXe siècle), Château de Versailles © RMN-Grand Palais (Château de Versailles) / Gérard Blot
Petite calèche du dauphin Louis Charles de France, futur Louis XVII (1785-1795)
Anonyme
Vers 1785-1789
Bois sculpté, peint et doré, bronze ciselé et doré, métal (fer) peint et doré et garniture en cuir rouge (XIXe siècle),
Château de Versailles
© RMN-Grand Palais (Château de Versailles) / Gérard Blot

Les jeux

En fin d’après-midi, les courtisans sont invités à rejoindre le Grand Appartement pour la soirée. C’est alors le temps du jeu ! Jeux de cartes comme le lansquenet ou l’hombre, jeu de hasard comme le portique, jeu d’adresse comme le billard. Le jeu s’immisce partout ; jeux d’argent où certains construisent des fortunes et d’autres se ruinent. La reine Marie-Antoinette et le comte d’Artois jouent au pharaon, un jeu risqué, quant à Louis XVI, il préfère la sratégie sage et simple du tric-trac, ancêtre du ba gammon.

© Château de Versailles, Didier Saulnier

© Château de Versailles, Didier Saulnier
© Château de Versailles, Didier Saulnier

Le bal 

Les réjouissances s’achèvent souvent par un bal, divertissement relevant de l’art de la danse. Mais sous ses allures légères, il ne faut pas perdre de vue la difficulté de l’exercice : les couples rivalisent d’élégance en grands costumes et se produisent dans un ordre bien précis, sous le regard admiratif ou moqueur de toute la cour assemblée.

Au temps de Louis XIV, les bals ordinaires ont lieu tous les samedis dans le salon de Mars ou la galerie des Glaces. Sous Louis XV, Versailles danse surtout dans le salon d’Hercule.  Les bals d’appartement à l’étiquette moins rigide étaient certainement les plus divertissants. Les bals costumés ou masqués, offrant plus de liberté, se développent sous le règne de Louis XV. Le plus célèbre d’entre eux est le Bal des Ifs du 25 février 1745, durant lequel la foule des courtisans, à la surprise de voir apparaître huit ifs parmi lesquels se cache le roi !

Charles Nicolas Cochin le Jeune Vers 1745 Encre brune,rehauts de blanc, aquarelle avec lavis gris, plume © RMN-Grand Palais (musée du Louvre) / Michèle Bellot

Charles Nicolas Cochin le Jeune Vers 1745 Encre brune,rehauts de blanc, aquarelle avec lavis gris, plume © RMN-Grand Palais (musée du Louvre) / Michèle Bellot
Charles Nicolas Cochin le Jeune
Vers 1745
Encre brune,rehauts de blanc, aquarelle avec lavis gris, plume
© RMN-Grand Palais (musée du Louvre) / Michèle Bellot

Le merveilleux 

Effets spéciaux, monstres, gloires et autres effets sonores entraînent les gens de cour dans un monde féérique. Les illuminations et feux d’artifice ajoutent encore au grandiose et au merveilleux des grandes fêtes avec des architectures éphémères, des gerbes multicolores ou des milliers de lumignons scintillant le long des allées du Parc ou du Grand Canal. À chaque fois, le spectacle demande créativité, technicité et ingéniosité et pour l’occasion, les meilleurs artificiers sont sollicités.

© Château de Versailles, Didier Saulnier

© Château de Versailles, Didier Saulnier
© Château de Versailles, Didier Saulnier

Pour parfaire l’expérience des fêtes à Versailles, l’exposition présente des accessoires de théâtre – marotte, diable surgissant de trappes – reconstitués pour la première fois, en grandeur nature, à partir de documents originaux, en utilisant uniquement des matériaux traditionnels. De même, la reconstitution d’une charpenterie de théâtre en coupe permet de mieux comprendre les effets de nuées et de gloires, qui se meuvent grâce à un sysème ingénieux de poulies.

© Château de Versailles, Didier Saulnier

© Château de Versailles, Didier Saulnier
© Château de Versailles, Didier Saulnier

Divertir pour gouverner. Louis XIV légua ce précepte au dauphin comme une règle pour sa vie de monarque. Il lui fallait chaque jour enchanter la cour de même qu’il la subjuguait par son autorité. Et que cet émerveillement colorât son règne et se répandît sur l’Europe. Le roi, protecteur des arts, encouragea tous les plaisirs, et ce, pendant presque un siècle. Ses successeurs suivirent, chacun avec ses propres goûts, ce modèle.

Catherine Pégard, Présidente de l’Établissement public du château, du musée et du domaine national de Versailles.


Informations pratiques : 

Fêtes et divertissements à la Cour

29 novembre 2016 – 26 mars 2017

Château de Versailles – Salles d’Afrique 

 

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