S’abandonner dans la sexualité enrichit aussi votre vie intérieure.
Quand les saints époux Louis et Zélie Martin entrent dans le mariage, ils rompent avec leur chasteté, ce qui est un pas difficile à franchir. S’ouvrant à un prêtre sur leur désir de poursuivre l’abstinence, celui-ci leur répond par un refus catégorique. Ils décident d’obéir, heureusement : c’est dans l’intérêt de leur couple. Ils ne devaient pas refuser l’abandon à la joie de la sexualité, à l’ouverture totale à l’autre et à la possibilité de donner la vie. Et ils donneront quatre carmélites, dont la petite Thérèse qui a très bien illustré la spiritualité carmélitaine de type “nuptiale”, dans la droite ligne du Cantique des Cantiques.
La joie de l’abandon
Suite à la lecture d’un article qui abordait la juste place du plaisir dans la sexualité, à la lumière de la pensée de saint Jean Paul II, une jeune mariée se confiait dans un commentaire. “Nos unions sont rares car nous avons peur d’être parents tout de suite. En semaine mon mari est fatigué par son travail donc aussitôt couchés aussitôt endormis, et un week-end sur deux il faut suivre la période d’abstinence. Je n’ai jamais eu beaucoup de plaisir, et même si ce n’est pas le but de nos unions, c’est aussi décourageant…”. Et où est la joie de l’amour dans tout cela ? Où est le don de soi, la rencontre ? En dehors de son tracas de devenir mère, n’est-ce pas plutôt l’absence d’allégresse, de rencontre et de bonheur, que la jeune femme souligne ici ? Bien sûr que cette vision de la sexualité est décourageante ! Le plaisir dans l’amour est un bon fruit, surtout s’il est signe d’une interdépendance sublimée. S’abandonner signifie se confier, se remettre entre les mains de quelqu’un et suppose donc la confiance en celui à qui nous nous abandonnons. Le don de soi dans la sexualité prend alors une autre dimension. Nous savons tous que c’est difficile, preuve en est de notre relation à Dieu à qui nous laissons souvent frileusement la possibilité de prendre soin de nos vies et de nous rejoindre.
L’extase spirituelle et sexuelle
Quand nous préférons notre volonté à celle de Dieu, n’est-ce pas révélateur de nos limites et de nos craintes? Pourtant, quel meilleur moyen de s’épanouir que d’accepter la sienne ?
La sexologue Catherine Solano souligne la relation entre sexualité et spiritualité, rappelant que le vocabulaire de chacun des domaines est parfois proche. Le chemin de la découverte mutuelle est une exploration sensorielle de soi et de l’autre, mais aussi très intérieure, qui permet de se rapprocher. Elle explique notamment l’intérêt du plaisir dans l’ouverture du cœur : “L’orgasme déclenche la sécrétion d’une hormone, l’ocytocine. C’est l’hormone qui ouvre le cœur. Par l’acte sexuel, on essaie inconsciemment de reproduire les sensations de plénitude de la vie fœtale, ce moment où l’on est le plus proche d’un autre être humain. Ainsi, plus on fait l’amour avec quelqu’un, plus on a confiance en lui et plus on est capable de s’abandonner. Et plus on s’abandonne, meilleur c’est… et plus on produit d’ocytocine”.
Être réceptif au corps de l’autre implique de recevoir son altérité, sexuelle et individuelle, et de laisser les sensations qu’il provoque nous envahir. Accueillir Dieu ou la personne que l’on aime est du même ordre, car Dieu n’est pas un vieux barbu qui regarde la Terre, il est là où il y a de l’amour. Il est une expérience, pas une théorie et le chemin de la foi se doit d’être très incarné sous peine de devenir cérébral. Accepter l’action de Dieu dans sa vie révèle le besoin d’ouverture du corps, du cœur et de l’âme à l’amour infini. Perdre le contrôle et admettre de manquer, sont aussi des conditions pour aimer. L’époux ou l’épouse ne peut pas tout combler, mais ce qui est donné et reçu est là, reste à s’ouvrir à Dieu pour apprendre à mieux aimer et se laisser aimer de son conjoint. Il est important de se souvenir que l’homme et la femme ont un rapport différent à l’abandon, par la nature de leur corps qui les dispose autrement à l’accueil et au don. De manière concomitante, la femme doit laisser l’homme être homme et l’homme laisser la femme être femme au moment de l’union. Cela sans imposer ses attentes ou sa manière d’être, car le féminin dit au masculin une part de Dieu qu’il ne connaît pas, et inversement.