Aleteia vous emmène à la découverte des lieux insolites qui ont fait l’Histoire de France. Tant de choses se sont passées à Reims au cours des 1 500 ans d’Histoire de France que cette ville porte en elle les joies et les douleurs du pays. De saint Rémi au Général de Gaulle, c’est la guerre et la paix qui se combattent, et le christianisme qui habille la cité.
Nicaise face aux barbares
Quand vient le temps de la dissolution de l’Empire romain, seuls les évêques restent dans les villes. Le pouvoir politique s’est évaporé, le pouvoir militaire n’est plus apte à agir ; ne demeurent que ces hommes de foi, tous issus de l’aristocratie romaine, qui assurent alors le ravitaillement de leur peuple et sa protection face aux attaques des envahisseurs. Nicaise est évêque de Reims lorsque la ville est attaquée par les Vandales, en 407. Il négocie avec eux la protection des habitants, ce qui échoue : Nicaise est décapité avec sa sœur Eutropie, et la ville est ravagée.
Remi face à l’histoire
Remi, un de ses successeurs, est plus heureux que lui. S’appuyant sur Clotilde et Geneviève, il parvient à convertir Clovis et à le baptiser dans la nuit de Noël 496. Avec le roi franc, c’est la France tout entière qui reçoit le baptême. Cet événement donne à Reims une position morale et politique majeure. Hincmar, évêque de Reims au IXe siècle, raconte comment le Saint-Esprit, sous la forme d’une colombe, est venu apporter la sainte Ampoule à Remi pour qu’il puisse oindre le roi avec le saint chrême. Ce faisant, il signifiait au roi que son pouvoir ne venait que de Dieu, non des hommes, et qu’il devrait rendre compte de son règne à Celui qui l’avait placé sur le trône. Par l’onction du sacre, le roi de France met ses pas dans ceux des rois d’Israël. Il est tout à la fois grandi, parce que Lieutenant de Dieu, et humilié, parce qu’il a un supérieur qui le dépasse infiniment.
La ville du sacre
Il faut toutefois attendre l’an 816 et le sacre de Louis le Pieux pour que les rois viennent à Reims et que celle-ci s’enracine comme étant réellement la ville du sacre. L’historien Marc Bloch rappelle l’importance du sacre de Reims pour l’histoire de la France : “Il est deux catégories de Français qui ne comprendront jamais l’histoire de France, ceux qui refusent de vibrer au souvenir du sacre de Reims ; ceux qui lisent sans émotion le récit de la fête de la Fédération”. Les objets du sacre sont conservés au palais du Tau, à côté de la cathédrale. Le manteau d’hermine fleurdelisé, les éperons, la main de justice, l’épée de Charlemagne, dénommée Joyeuse, la couronne ; tout ce qui forme les regalia et que les rois se transmettent après chaque génération. Charles X est le dernier roi sacré à Reims (1825).
Après le sacre, la coutume veut que les rois se rendent en pèlerinage à Corbeny, village situé non loin de Reims, pour y vénérer les reliques de saint Marcoult, un moine du VIe siècle réputé pour guérir les écrouelles et qui était le saint patron protecteur des rois de France.
La ville de l’éducation
C’est à Reims que naquit saint Jean-Baptiste de La Salle en 1651, le fondateur des Frères des Écoles chrétiennes, déclaré saint patron des professeurs. Non seulement il modifie la façon d’enseigner en apportant des innovations pédagogiques majeures, mais il fonde de très nombreuses écoles à travers tout le royaume afin d’instruire les plus pauvres. Ces écoles sont financées par des personnes privées, ce qui permet aux enfants des déshérités de s’y rendre sans frais. Il contribue ainsi à propager la maitrise de la lecture et à accroître l’instruction parmi les couches les plus pauvres. Sa congrégation de maîtres enseignants est une des plus dynamiques, et aujourd’hui encore c’est elle qui possède le plus d’établissements privés en France.
La ville de la guerre
Mais Reims est lourdement touchée par les deux guerres mondiales. La ville est bombardée et détruite à presque 90%, et sa cathédrale est endommagée. Celle-ci est restaurée à partir de 1919, notamment grâce à des dons importants du magnat du pétrole, Rockefeller. De même pendant le deuxième conflit mondial, où la ville subit de nouveaux combats. C’est à Reims que, le 7 mai 1945, les Allemands signent leur reddition et que s’achève la guerre en Europe. Une deuxième reddition est signée le lendemain à Berlin, le 8 mai, à la demande de Staline.
La ville de la paix
Cette ville qui a tant souffert et qui porte les traces de l’affrontement franco-allemand devient la cité de la réconciliation. Le 8 juillet 1962, le Général de Gaulle reçoit le chancelier allemand Konrad Adenauer. Tous les deux se rendent dans la cathédrale pour une messe célébrée par l’archevêque de la ville, Mgr Marty, futur cardinal de Paris. L’ange de la cathédrale peut de nouveau sourire : cette église qui a vu passer tant de rois et qui a si souvent scellé l’union des Francs et de l’Église revient à sa vocation première : être un lieu de pardon et de joie.