Aleteia vous emmène à la découverte des lieux insolites qui ont fait l’Histoire de France. La France a été construite par les familles, que celles-ci agissent dans les domaines politique, culturel, économique ou spirituel. Trois familles ont régné sur la France : les Mérovingiens, les Carolingiens et les Capétiens, de l’accession d’Hugues Capet en 987 au renversement de Louis-Philippe en 1848. Pendant mille ans, le royaume de France a été un royaume capétien, où se sont succédées les différentes branches de cette famille, dont les Bourbon et les Orléans. Mais aux XIIe-XIIIe siècles, les Capétiens eurent à affronter leurs cousins Plantagenêt, qui contrôlaient l’ouest du pays et l’Angleterre. C’est de cette confrontation qu’a émergé la guerre de Cent Ans qui, avant d’être une guerre entre la France et l’Angleterre est d’abord une guerre de famille entre deux branches cousines qui cherchent à porter la même couronne. D’Azincourt (1415) à la bataille de Castillon (1453), c’est Hastings qui a été sans cesse rejoué.
La dynastie Plantagenêt
Les Plantagenêt sont issus de Foulques Nerra (965-1040), comte d’Anjou. Un de ses descendants, Geoffroy V d’Anjou (1113-1151) épouse au Mans Mathilde l’Emperesse, fille d’Henri Ier, roi d’Angleterre et veuve de l’Empereur. Par cette union, le comte d’Anjou devient l’héritier du trône d’Angleterre, même si Geoffroy ne parvient pas à le contrôler. C’est son fils, Henri II (1133-1189), qui y accède. À cela, il ajoute une suzeraineté sur la Normandie, l’Anjou, le Poitou et l’Aquitaine, par son mariage avec Aliénor, ancienne épouse de Louis VII de France. Non seulement la domination territoriale était grande, mais les territoires possédés comptaient parmi les plus riches d’Europe. C’est Henri II qui gagna le surnom de Plantagenêt, et qui édifia cet empire atlantique qui aurait pu être viable et dont la survie aurait bouleversé l’équilibre européen. À sa mort, Aliénor voulut offrir une nécropole de roi, tout à la fois pour honorer son mari et pour affermir la gloire de cette famille. Les rois de France avaient l’abbaye de Saint-Denis, les Plantagenêt auront l’abbaye de Fontevraud.
Fontevraud, nécropole royale
Abbaye bénédictine située en Anjou, non loin de la Touraine, Fontevraud a été fondée en 1101 par Robert d’Arbrissel. Elle s’étend sur un domaine de plus de treize hectares où se trouvent de nombreux bâtiments, dont une vaste église abbatiale. Henri II a passé une partie de sa vie en guerre contre ses propres fils, Richard et Jean. Quand Richard meurt à son tour, en 1199, Aliénor le fait enterrer à Fontevraud, au côté de son père, pour marquer le fait que la mort scelle leur réconciliation, et pour faire de Fontevraud le centre spirituel et politique de cette famille qui prétend à une haute destinée en Europe. Sa sœur, Jeanne, enceinte et malade, se retire à son tour à Fontevraud, pour y accoucher et y mourir. Et en 1200, Aliénor, âgée de 80 ans, se retire dans cette abbaye pour y passer les dernières années de sa vie. Elle meurt en 1204 et son corps rejoint l’église où sont déjà enterrés son mari et ses enfants. En 1250, Raymond VII comte de Toulouse et petit-fils d’Henri II, est enterré aux côtés de sa mère, Jeanne, de ses oncles et de ses grands-parents. Jean sans Terre n’est en revanche pas enterré à Fontevraud, mais en Angleterre, dans la cathédrale de Worcester. Cela pour des raisons essentiellement pratiques puisqu’il est mort dans cette île.
Liée à la famille Plantagenêt, l’abbaye décline avec la chute de celle-ci. Ils n’arrivent pas à contrôler l’Angleterre ni la France, ni à maintenir la cohésion de territoires morcelés et très éloignés les uns des autres. Vaincus par le roi de France et chassés du trône d’Angleterre, les Plantagenêt ne passent pas le XIIe siècle.
L’abbaye des temps modernes
Au XVe siècle, l’abbaye est dirigée par des abbesses issues de la famille de Bourbon, ce qui contribue à maintenir le lien royal qui l’unit à la France. Louis XIV nomme abbesse la sœur de Mme de Montespan, Marie-Gabrielle de Rochechouart, qui s’acquitte de ses fonctions avec beaucoup de talents. Elle réforme l’ordre, restaure la vie spirituelle, tout en y maintenant une vie de cour. Plus tard, Louis XV confie l’éducation de ses quatre filles aux religieuses de Fontevraud. L’abbaye n’est plus une nécropole royale, mais devient ainsi un centre d’éducation pour les futures princesses, promises à de beaux mariages. Comme de nombreuses abbayes en France, la Révolution porte un coup mortel à la vie spirituelle des lieux. Comme Clairvaux, celle-ci est transformée en prison en 1804, par décret de Napoléon. La prison ferme en 1963, ce qui permet de restaurer une grande partie des bâtiments et de rendre à l’histoire ce haut lieu français.