Entourée de l’enfer qui règne à Alep, Sœur Annie s’efforce de préparer pour les gens une joyeuse fête de Noël, avec le soutien de l’AED.
Il n’est pas facile de retrouver le sourire lorsqu’on subit une guerre depuis cinq ans. Musique de Noël, ballons multicolores: Sœur Annie et tous ceux qui l’aident ont paré la salle communale de décorations de Noël. Des cadeaux sont distribués. Il y a de joyeux visages. Et pourtant, cette idylle peu avant Noël n’est qu’un bref moment de répit pendant lequel les habitants d’Alep oublient dans quelles circonstances ils sont obligés de vivre. “Il y a deux jours, des roquettes sont tombées tout près de nous. Six personnes ont été tuées. Quelques jours auparavant, c’est une maison d’habitation qui a été touchée. Il n’y a pas eu de mort, mais beaucoup de blessés. Quand on dit blessé, cela signifie souvent que des gens ont perdu des bras ou des jambes. Pour nous ici, c’est le quotidien. En quittant sa maison, personne ne sait s’il rentrera vivant. Il ne nous reste plus que la confiance en Dieu”, raconte Sœur Annie.
La religieuse catholique arménienne de la congrégation Jésus et Marie persévère depuis des années à Alep, ville terriblement marquée par la guerre en Syrie. Les troupes du gouvernement et les rebelles occupent différentes zones d’Alep, se livrant d’incessants combats. Avec ses consœurs et des volontaires, Sœur Annie est au service des chrétiens d’Alep, en s’efforçant de fournir des vêtements, des moyens de chauffage, des aides pour payer le loyer, et des médicaments, avec le soutien de l’AED. Jadis, des centaines de milliers de chrétiens vivaient dans cette métropole commerciale prospère du nord de la Syrie. Ils ne sont plus que quelques dizaines de milliers, qui sont restés dans la ville largement détruite. “Chez nous, la vie est tellement difficile. Souvent, des jours durant, nous n’avons ni eau ni électricité. Surtout maintenant en hiver, il fait un froid mordant. Récemment, j’ai rendu visite à une famille qui vivotait dans son logement détruit par une roquette. Mon cœur a pleuré.”
Comme par le passé, Sœur Annie tente cette année également de préparer une joyeuse fête de Noël aux gens. “Nous distribuons des pantalons, des pull-overs et des anoraks aux gens. Souvent, ils n’ont pas les moyens de s’acheter de nouveaux vêtements” : 12 000 vêtements ont été confectionnés pour 3 000 personnes dans le besoin. “Les vêtements ont été fabriqués ici à Alep par des tailleurs chrétiens. Ils m’ont dit qu’ils étaient reconnaissants de recevoir ces commandes. Pour eux, c’est du travail qui leur permet de nourrir leur famille.” Le soutien bénéficie non seulement aux gens d’Alep, mais aussi aux chrétiens d’Hasaké, une ville au nord-est de la Syrie. “Avant, nous pouvions transporter nos biens humanitaires d’Alep à Hasaké en camion. Mais comme Daech a entre-temps conquis le territoire situé entre les deux villes, ce n’est plus aussi facile. “
“C’est la cinquième fois que les chrétiens de Syrie doivent célébrer les fêtes de Noël pendant la guerre. Les gens n’ont plus de joie au cœur. Naturellement, ils iront à l’église. Mais il n’y a plus la joie que nous ressentions tous auparavant à Noël. À sa place, il n’y a plus que la tristesse.” Elle évoque un vieil homme, qui lui a dit l’air accablé que lui et sa femme ne seraient qu’à eux deux à Noël. “Avant, tous ses seize enfants et petits-enfants venaient célébrer Noël avec eux. Maintenant, ils sont tous partis. Ils se sont enfuis. Il ne reste plus que les deux aïeuls”. Beaucoup de gens subissent la même situation que ce vieux couple. Ils ont perdu des proches lors des attaques, leurs fils ont servi dans l’armée ou les enfants ont pris la fuite. “Dans chaque maison, il y a une histoire triste à raconter”, déplore Sœur Annie. Mais les gens ont confiance en Dieu. Ils se réjouissent que leurs frères chrétiens à l’étranger ne les aient pas oubliés”.