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Saint Jean Paul II, un auteur inattendu (2/3) : l’homme de théâtre

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Marie Lorne - publié le 07/11/15
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Michel-Olivier Michel est metteur en scène et comédien professionnel. En 2011, il jouait le personnage d’André dans le film "La boutique de l’orfèvre" de Paul de Larminat, adapté de l’œuvre de Karol Wojtyła. Il livre ici sa vision du texte de théâtre du saint Pape polonais.

Michel-Olivier Michel est metteur en scène et comédien professionnel. En 2011, il jouait le personnage d’André dans le film “La boutique de l’orfèvre” de Paul de Larminat, adapté de l’œuvre de Karol Wojtyła. Il livre ici sa vision du texte de théâtre du saint Pape polonais.

En 2011, il jouait le personnage d’André dans l’adaptation en film de la pièce de Jean Paul II, La boutique de l’orfèvre. Sa dernière mise en scène, Tactique du diable, a rassemblé 5000 spectateurs en 3 ans à l’Espace Bernanos à Paris, pièce qu’il reprend à Lyon du 10 au 13 décembre 2015. Michel-Olivier Michel est metteur en scène et comédien professionnel.

Sa conception du théâtre est personnelle et affirmée, tranchant parfois avec celle de ses contemporains : “Quand j’étais étudiant en théâtre, l’enseignement, pourtant intéressant, se résumait essentiellement à développer sa palette d’émotions. Il fallait d’abord occuper la scène et susciter l’attention. Le sens profond du texte passait en second plan. Or, il me semble qu’au théâtre les émotions demeurent un moyen – certes puissant – mais ne peuvent remplacer la finalité : faire parvenir une vérité qui vient éclairer l’homme sur lui-même et la réalité qui l’entoure”.

Après ses études, Michel-Olivier intègre le Cours Florent comme professeur en 2003. Il joue et met en scène des pièces écrites par le philosophe Fabrice Hadjadj telles que À quoi sert de gagner le monde, Pasiphaé, Gabbatha Passion-Résurrection. En 2011, il fonde les Ateliers Philo-Théâtre avec l’objectif d’apporter aux acteurs une réflexion philosophique et de mettre la personne au centre de l’art théâtral. Cette année marque également la sortie du film de Paul de Larminat, La boutique de l’Orfèvre, adaptant la pièce de Jean Paul II pour le cinéma.

“La conscience de chaque personnage est comme une scène de théâtre”

La boutique de l’orfèvre, c’est l’histoire de l’Amour au pluriel. Dans la pièce de Jean Paul II, André et Thérèse se marient mais André meurt à la guerre. Anna et Stéphane s’aiment mais vivent ensuite dans l’indifférence. Quant aux enfants de ces deux couples, Monique et Chistophe, ils se demandent s’ils réussiront à construire leur amour après avoir été témoins des difficultés de leurs parents. Au centre, il y a Adam, la voix de la vérité qui éclaire, fait voler en éclats les masques de chacun et leur donne l’espérance.

En jouant cette pièce, c’est “la description précise du conflit interne qui fait souffrir un être humain” qui a, d’emblée, frappée Michel-Olivier. “C’est la profondeur et la délicatesse de l’âme humaine qui se dégage dans ce texte. Éclairée progressivement, la conscience de chaque personnage est comme une scène de théâtre où l’histoire avance au fur et à mesure que chaque protagoniste relit son existence en vérité”, explique-t-il.

Karol Wojtyla, Un auteur difficile à jouer

Chez Karol Wojtyła, la parole est au centre : “La forme de son théâtre peut dérouter le spectateur actuel habitué aux images spectaculaires et aux effets spéciaux car l’action y brille par son absence”, explique Michel-Olivier. “La parole est pour saint Jean Paul II le principal instrument au service de la vérité. Elle a pour but de répondre à la question : ‘Peut-on aimer quelqu’un toute sa vie ?’.”

Saint Jean Paul II avait lui-même expliqué son choix d’un style rapsodique car, pour lui, le sens de la pièce ne se trouve pas dans les événements. Ce n’est pas l’histoire qui fait avancer mais la réflexion que les personnages formulent au fond d’eux-mêmes au sujet de cette histoire. Le débat est intérieur. D’ailleurs, les textes de la pièce sont à l’imparfait, ce qui donne plus un aspect récit que théâtral. C’est une temporalité qui tranche avec les textes de scène habituels, tous au présent.

Alors quand on demande à Michel-Olivier si une telle pièce est facile à jouer pour un acteur, la réponse ne se fait pas attendre : “Non, Karol Wojtyła est difficile à interpréter de toute façon ! Certes, le travail de l’acteur est de se laisser toucher par la profondeur du texte, mais on aimerait parfois s’appuyer sur autre chose car ici, tout découle de la pensée, ce qui semble d’ailleurs paradoxal pour le grand théologien du corps qu’il est. Difficile à accepter pour un acteur. Cela demande beaucoup de travail, en particulier d’un point de vue vocal”, un genre rapsodique compliqué à jouer et à lire aujourd’hui. Cet attachement si fort à la parole, en dépit du reste, pourrait provenir du contexte d’oppression stalinienne dans lequel vivait saint Jean Paul II. Un moyen de la remettre au centre alors qu’elle était confisquée en permanence.

“Arracher son masque au mal par le théâtre”

Cette parole de Shakespeare dans Hamlet, “arracher son masque au mal voilà le sens du théâtre”, Karol Wojtyła la reprendra à son compte en pleine oppression nazie puis soviétique. Ce leitmotiv du théâtre de saint Jean Paul II a marqué Michel-Olivier Michel : “Le théâtre est un espace où l’invisible peut se rendre visible, où ce qui est caché peut être dévoilé. Cette pensée de Jean Paul II me suit : elle m’a d’ailleurs inspiré pour adapter et mettre en scène Tactique du diable“. Cette idée du théâtre, Shakespearienne à la base, saint Jean Paul II l’a fait sienne. Une vision de la scène qui n’étonnera pas les témoins de son pontificat.

Tactique du diable (à Lyon)
Du 10 au 13 décembre 2015 au Théâtre des Maristes.
Réservation sur www.weezevent.com/tactiquedudiable-lyon

 

Retrouvez dès demain la troisième et dernière partie de notre série sur Saint Jean Paul II, un auteur inattendu : le philosophe des temps modernes.

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