Au cours du vol entre Cuba et les États-Unis, le pape François s’est exprimé sur les critiques exprimées à l’encontre de son magistère.Le Saint-Père a répondu sans détour à nos confrères qui voyageaient à bord de son avion entre Cuba et les États-Unis, un jeu du question-réponse décapant !
“Je ne fais que m’en tenir à la doctrine sociale de l’Église”, assure le Pape. Sur l’embargo américain : “J’espère qu’un accord donnant satisfaction à tous sera conclu”. Sur les dissidents cubains : “Certains ont été invités pour une salutation à la cathédrale. Personne ne s’est identifié comme dissident, je n’ai pas d’information concernant des arrestations”. Sur sa rencontre avec Fidel : “Nous avons parlé de Laudato Si’ et de ses études chez les jésuites”.
Que pensez-vous de l’embargo contre Cuba ?
Pape François : La fin de l’embargo fait partie des négociations entre les États-Unis et Cuba, j’espère qu’un accord donnant satisfaction à tous sera conclu. Au Congrès, je parlerai des accords comme signes d’un progrès vers un coexistence harmonieuse.
Quinze dissidents cubains auraient été arrêtés. Souhaitiez-vous les rencontrer ?
Pape François : Je n’ai pas eu d’information concernant des arrestations. J’aime les rencontres, toute personne étant un signe de Dieu. Je ne souhaitais pas d’audience privée, ni même avec des chefs d’États. À la cathédrale, j’ai salué tout le monde mais personne ne s’est identifié comme dissident.
Lorsque Fidel Castro était au pouvoir, l’Église a grandement souffert. Semblait-il vouloir se repentir ?
Pape François : Le repentir est une question intime. Nous avons parlé de ses études chez les jésuites, de Laudato Si’. Il est très préoccupé par l’écologie. Ce fut une rencontre informelle et spontanée.
En quelques années, il y a eu trois visites papales à Cuba, est-ce parce que ce pays “souffre” d’une sorte de maladie ?
Pape François : Non. La première visite de Jean Paul II fut historique mais normale : il se rendait dans de nombreux pays agressifs envers l’Église. La deuxième, normale aussi, fut avec Benoît XVI. La mienne fut une coïncidence. Je souhaitais initialement rejoindre États-Unis par la frontière mexicaine. Puis vint l’annonce d’un dégel des relations avec Cuba. D’où ma décision, et j’en suis ravi.
L’Église catholique peut-elle venir en aide aux Cubains ?
Pape François : L’Église cubaine travaille à l’établissement d’une liste de prisonniers à amnistier. Plus de 3 000 l’ont déjà été. L’on m’a dit un jour : la prison à vie est une condamnation à mort déguisée, mettons-y fin ! Autre possibilité : des amnisties générales tous les deux-trois ans. L’Église a beaucoup fait en ce sens, et elle continuera.
Vos dénonciations contre les inégalités engendrées par le système économique mondial vous ont valu certaines réactions étranges, des pans entiers de la société américaine se demandant même si le Pape est catholique…
Pape François : Un cardinal m’a raconté qu’une dame très catholique lui avait demandé si j’étais l’anti-Pape car je ne portais pas de mules rouges. Et concernant le communisme : je n’ai rien dit qui ne soit pas dans la doctrine sociale de l’Église. Peut-être est-ce à cause d’erreurs d’interprétation. S’il faut que je récite le Credo, je suis prêt à le faire !
Lors de votre dernier séjour en Amérique latine, vous avez eu des mots très durs envers le capitalisme. À Cuba, vous avez été moins critique envers le communisme. Pourquoi ?
Pape François : Dans mes discours à Cuba, je me suis toujours référé à la doctrine sociale de l’Église. J’ai été très clair quant aux changements nécessaires. Concernant le capitalisme sauvage, je m’en suis strictement tenu à Evangelii Gaudium et Laudato Si’, en employant un langage pastoral.