“Ne laissez pas la Tunisie seule sinon les islamistes seront à vos portes”, met en garde le père Jawad Alamat, directeur national des Œuvres pontificales missionnaires (OPM) et curé de paroisse à Sousse.
"Ils veulent punir la Tunisie pour ses progrès en démocratie, ne la laissez pas seule sinon la menace islamiste sera à vos portes", met en garde le père Jawad Alamat, directeur national des Œuvres pontificales missionnaires (OPM) et curé de paroisse à Sousse, théâtre le 26 juin dernier, du terrible attentat qui a fait 38 morts – essentiellement des touristes – et une quarantaine de blessés sur la plage d’un hôtel à Port El-Kantaoui.
Non à l’isolement de la Tunisie
Trois mois après l’attentat au musée du Bardo, ce nouveau coup dur porté à l’économie tunisienne, en pleine ouverture de la saison touristique, marque de toute évidence la volonté de Daesh de briser le dernier rempart qui protège l’Europe contre l’immigration clandestine, la contrebande, le trafic de drogues et d’armes et l’infiltration de terroristes. "Sa sécurité est en fait partie intégrante de celle de l’Europe. Son essor, aussi", comme cela avait été fortement souligné au sommet du G7, en Bavière, début juin.
Le père Alamat, qui se trouvait à Tunis le jour de l’attentat et s’est précipité à Sousse pour apporter sa solidarité, s’inquiète d’un possible "isolement progressif" de la Tunisie qui ne ferait qu’aggraver la situation : "La Tunisie a besoin de votre aide, de votre visite. L’isoler signifie faire gagner les terroristes. Il faut combattre l’isolement que les terroristes veulent imposer à la Tunisie, en renforçant la solidarité", déclare-t-il à l’agence Fides. "Nous devons combattre ceux qui veulent nous ôter la joie de vivre et le fait d’être ensemble". Le père Alarmat insiste sur l’importance d’encourager la Tunisie à poursuivre sa transition démocratique – unique dans le monde arabe – et à la porter à terme avec succès. Dans le cas contraire, affirme-t-il, "le danger islamiste frappera aux portes de l’Europe". Il suffit de voir ce qui s’est passé en Libye. "Aucune solution n’a été trouvée pour ce pays, et maintenant ses problèmes sont devenus communs aux autres pays de la Méditerranée", conclut-il.
Sensibiliser la jeunesse, un enjeu de taille
Lors d’une conférence de presse, au lendemain de l’attaque de Sousse, la directrice de l’hôtel Zohra Driss, qui est également député, a adressé un message aux pays étrangers qui allait dans le même sens : "La Tunisie sera le dernier rempart contre le terrorisme !", soulignant que si l’Europe voulait se prémunir contre d’éventuelles attaques d’extrémistes, il faudra commencer par sécuriser la Tunisie. "Ceux qui veulent et peuvent nous aider sont d’ailleurs les bienvenus, mais nous allons de toute façon faire le maximum par nos propres moyens", a déclaré quant à lui le président de la République tunisienne Béji Caïd Essebsi dans une interview accordée à plusieurs médias français. Le président a mis l’accent sur les efforts déployés par la société civile tunisienne pour sensibiliser la jeunesse du pays au problème, mais reconnaît en même temps qu’il s’agit "d’un enjeu de taille", d’autant plus que "quelque 3 000 jeunes Tunisiens seraient engagés aujourd’hui aux côtés de l’organisation de l’État islamique".
Premières mesures tunisiennes, aucune mesure européenne
Après l’attentat, le ministère de l’Intérieur a annoncé une série de mesures qui ont notamment pour but de renforcer les effectifs des forces de sécurité, de fermer 80 mosquées dites "hors contrôle" et de sécuriser les zones touristiques (RFI). Le gouvernement affiche également une volonté d’être plus vigilant à l’égard des mouvements religieux. Lundi 29 juin, Mohamed Ghasali, le ministre de l’Intérieur, a souligné que désormais, seules les mosquées dirigées par des imams "agréés" par l’État seront acceptées. Le ministre veut aussi renforcer le contrôle du financement des partis religieux et des associations islamiques. Les ministres français, britannique et allemand de l’Intérieur se sont également rendus en Tunisie pour affirmer leur soutien au pays dans la lutte contre le terrorisme. Mais aucune mesure concrète n’a été annoncée depuis.