Dans la région de Khabour, au Nord-Est de la Syrie, l’État islamique a reculé sous la pression de ses adversaires coalisés.
Alors que l’attention mondiale est concentrée sur la bataille pour reconquérir Palmyre, les combats continuent dans plusieurs régions, et notamment dans le Nord-Est du pays. Au mois de février 2015, 14 villages assyriens chrétiens, au bord de la rivière Khartoum, avaient été envahis par le pseudo État islamique (EI). Ils viennent d’être repris par les forces armées kurdes, soutenues par la coalition et des milices d’autodéfense chrétiennes.
Des adversaires hétéroclites qui complexifient le conflit
Si l’EI regroupe une myriade de groupuscules, tenant autant de l’islamisme que du banditisme, ses adversaires ne sont pas moins fragmentés. Outre l’armée arabe syrienne et ses alliés de circonstance kurdes, divers groupes d’autodéfense ont vu le jour. Les milices chrétiennes des "gardiens du Khabour" se sont formées quand la région a été menacée par l’autoproclamé État islamique. D’autres milices, comme les Forces de défense nationale qui contrôlent la région d’Al-Hasakah, dans l’Est de la Syrie, se sont montées à la demande du gouvernement syrien. Toutes ont des degrés d’indépendance divers vis-à-vis de l’armée de Bachar el-Assad.
Une région dévastée
L’assaut mené contre l’EI a été soutenu par des frappes aériennes de la coalition. Les positions djihadistes ont été bombardées pendant quatre jours, avant que les Kurdes et les chrétiens ne reprennent le terrain en dix jours, d’après l’Observatoire syrien des droits de l’homme. Les destructions des combats s’ajoutent à celles perpétrées par les djihadistes du "calife" Al-Baghdadi qui ont arraché les croix et pillé les églises. Le dimanche de Pâques, les militants islamistes avaient fait sauter l’église de la Sainte-Vierge-Marie, à Tel Nasri, un village assyrien dans la région où l’EI se battait contre des milices kurdes et chrétiennes. Le retour des chrétiens dans leurs villages est aussi compliqué par les mines que les djihadistes laissent souvent derrière eux.
Un épisode dans l’histoire assyrienne
Ces villages chrétiens avaient été fondés dans les années 1930, par des chrétiens qui fuyaient à l’époque les massacres perpétrés par l’armée irakienne. En 1933, alors que l’Irak disposait d’une fausse indépendance sous contrôle britannique, le clergé assyrien plaidait en vain auprès de la Société des Nations en vue d’obtenir une région assyrienne autonome dans le Nord de l’Irak. Le patriarche Mar Eshai Shimun XXIII tenta de négocier avec l’autorité de Bagdad, mais fut fait prisonnier, puis dut partir en exil pour Chypre. Les rumeurs les plus folles se mirent à courir parmi la population musulmane irakienne : les chrétiens assyriens cherchaient à réaliser un coup d’État, se préparant à couper les routes et à empoisonner les fontaines. L’armée irakienne, envoyée "pacifier" le Nord du pays, se livra elle-même à une série de massacres de chrétiens. Ces exactions atteignirent leur paroxysme dans la ville de Simele, au nord de Mossoul, le 7 août 1933. Une partie des chrétiens assyriens qui s’était établie dans la région pour fuir le génocide de 1915 espéra alors trouver son salut en Syrie.