Aucun des deux candidats UMP n’étant frère, la Fraternelle parlementaire ne s’est cette fois pas réunie pour choisir qui sera élu dimanche à la présidence du sénat.
Mais qui détient vraiment le pouvoir, dans notre République, de faire et de défaire les rois de la démocratie que sont parfois nos élus ? La réponse est parue il y a quelques semaines de cela, presque subrepticement, sur le site du Figaro : le président d’honneur de la Fraternelle parlementaire, Bernard Saugey, sénateur UMP de l’Isère, y confiait que cette Fraternelle « ne s’est absolument pas réunie pour prendre position » entre les deux hommes, adversaires pour la présidence du Sénat, aucun des deux n’étant franc-maçon. « Nous voulons laisser une liberté totale de vote à nos frères », insistait-t-il alors.
Qu’apprend-on en lisant cela ? Bien des choses à la fois : d’abord que ni Gérard Larcher, ancien président du sénat, ni l’ancien Premier Ministre Jean-Pierre Raffarin ne sont frères. Sauf à ce qu’ils le soient tous deux, bien évidemment, mais dans ce cas soit la Fraternelle se serait réunie pour trancher, soit le fait de ne pas trancher vise à avantager le moins bien soutenu des deux par les différentes loges.
Mais puisque Bernard Saugey tient tant à insister sur le fait que cette Fraternelle ne se soit pas réunie pour trancher, et sur la liberté de choix laissée cette fois aux "frères" élus, cela veut surtout dire que d’ordinaire, si l’un des candidats est maçon, la Fraternelle Parlementaire se réunit pour valider le soutien qui lui sera apporté avant même le scrutin réel. Pour choisir rien moins que le troisième personnage de l’Etat ? Voilà de quoi laisser rêveur quand à la façon dont les décisions peuvent parfois se prendre en toute fraternité au sommet de la République, qu’il s’agisse du choix d’un ministre de l’Intérieur ou d’un transfert au Panthéon. Quant à la garde des Sceaux Christiane Taubira elle assiste, samedi 27 septembre, au dîner annuel de la Grande Loge de France…
Au détour de cette brève somme toute passée inaperçue, on apprend également que, loin d’être anecdotique, la Fraternelle parlementaire, actuellement présidée par le député socialiste du Nord Christian Bataille, compte pas moins de 410 membres, entre les parlementaires, leurs collaborateurs et même les fonctionnaires des deux assemblées qui la constituent. Un pourcentage impressionnant voire détonnant, pour une société discrète qui n’avait jamais autant été représentée depuis un siècle dans les premiers cercles du pouvoir.