La vie chrétienne n’est pas un long fleuve tranquille, ni une réalité à dominer mais un élan de tout l’être vers Dieu et vers le prochain.(Légende photo : la bienheureuse Mère Teresa au chevet d’un mourant)
Du blogue de Jacques Gauthier
Tout ce qui est humain m’intéresse et nourrit ma foi. La foi chrétienne n’est pas une possession tranquille, mais une lutte pour que la vie soit plus humaine, un engagement de tout l’être. Une foi qui aime est une foi qui nous fait sortir de nos sécurités pour aller vers l’autre. La foi des pharisiens peut devenir un piège si elle ne débouche pas sur une foi incarnée dans l’amour, la compassion, la justice, la miséricorde, comme nous le montre si bien le pape François.
L’amour du prochain
Le chemin le plus sûr pour aller vers Dieu passe par l’amour du prochain. Cet amour devient le baromètre de notre amour de Dieu : « Si quelqu’un dit : « J’aime Dieu », alors qu’il a de la haine contre son frère, c’est un menteur. » (1 Jean 4, 20) « Le Verbe s’est fait frère », disait Christian de Chergé, prieur du monastère trappiste de Tibhirine, assassiné avec six de ses frères le 21 mai 1996. Ce triste événement a fait l’objet du très beau film Des hommes et des dieux.
La foi nous engage dans ce monde que le Père a tant aimé en nous donnant son Fils unique : « Ainsi tout homme qui croit en lui ne périra pas, mais il obtiendra la vie éternelle » (Jean 3, 16). S’il n’y a pas de don de soi, la foi reste incomplète. Cet engagement de notre vie dans la foi se concrétise par des œuvres de miséricorde. « Celui qui n’agit pas, sa foi est bel et bien morte, et on peut lui dire : Tu prétends avoir la foi, moi je la mets en pratique. Montre-moi donc ta foi qui n’agit pas ; moi, c’est par mes actes que je te montrerai ma foi » (Jacques 2, 17-18).
Une vie de compassion
Jésus a montré par sa vie que le service envers les autres et la compassion sont une lutte contre les forces du mal : le mensonge, l’hypocrisie, la vengeance, les préjugés. Il prend lui-même la place du serviteur en lavant les pieds de ses disciples : « Il prendra la tenue de service, les fera passer à table et les servira chacun à son tour » (Luc 12, 37). Le poète Patrice de La Tour du Pin évoque ce renversement de rôles dans son hymne eucharistique Tous les chemins de Dieu vivant : « N’hésitez pas, ouvrez la porte, / Demandez Dieu, c’est lui qui sert, / Demandez tout, il vous l’apporte : / Il est le vivre et le couvert ».
Disposer son cœur à l’indifférence aux injustices que subissent les autres, c’est refuser de voir que Dieu est Amour. La parabole du bon Samaritain où l’étranger se fait proche de l’homme blessé (Luc 10, 25-37) illustre cette compassion divine. On croit en Dieu en l’aimant, on le trouve en le servant dans le plus démuni. « Chaque fois que vous l’avez fait à l’un de ces petits qui sont mes frères, c’est à moi que vous l’avez fait. » (Matthieu 25, 40)
Cette parole qui a tant séduit Mère Teresa nous révèle que celui qui a faim, qui est nu, étranger et en prison, c’est le « Je Suis » de l’Ancien Testament révélé en Jésus. Elle écrit : « Jésus s’est fait pain de vie pour satisfaire notre faim de Dieu, puis il s’est converti en l’affamé pour que nous puissions satisfaire sa faim. » L’engagement chrétien est le fruit de la rencontre profonde de ces deux faims.
Paru au Canada dans lePrions en Églisedu 13 juillet 2014, p. 35-36.