Le footballeur français Bafé Gomis vient de quiter Lyon pour Swansea City. Et côté foi aussi, ce garçon est marquant.
Ses tweets sont sans mystère. Le joueur lyonnais d’origine sénégalaise a habitué son club et ses supporters aux cierges autant qu’aux chandelles. Pourtant, sans sa foi cramponnée, la vie du jeune Bafé aurait bien pu ne pas tourner rond. Après une enfance dans la cité HLM de la Beaucaire à Toulon, le salut est venu par le foot. Repéré par l’Association sportive de Saint-Étienne, il en intègre le centre de formation à 15 ans. Depuis, Gomis a rejoint l’Olympique Lyonnais à un poste d’attaquant. « Garçon au super état d’esprit » (Bernard Lacombe), le joueur se démarque en pratiquant. Sa règle du jeu ? Si le foot est d’argent, la foi est d’or. Dans ses déclarations, elle se taille la part du Lyon, même s’il vient de rejoindre le 27 juin dernier l’équipe anglaise de Premiere League de Swansea City.
Bafé, vous étiez encore dans l’œuf quand Sainté vous a couvé ! Geoffroy-Guichard, c’est le stade où tout a commencé pour moi. Je me rappelle quand je suis arrivé gamin, à 14 ans, dans les bureaux de l’Asse avec mes parents inquiets de me laisser loin de Toulon. Le club m’a accueilli et m’a permis de grandir.
Nostalgique des années stéphanoises ? J’ai passé de très belles années là-bas, je me suis épanoui aussi bien footballistiquement que personnellement. À Saint-Étienne, j’ai une seconde famille dans le club, comme dans la ville. Je n’oublierai jamais mon passage là-bas. Il m’a permis d’évoluer au plus haut niveau et de défendre aujourd’hui les couleurs de l’OL.
Comment marquez-vous autant de buts ? Pour marquer des buts, il faut un don. C’est un don de Dieu et beaucoup de travail.
Le coup d’envoi de votre foi ? Je suis né de parents chrétiens. Ils m’ont transmis la foi qui a beaucoup compté pour moi, aussi bien dans ma vie de footballeur, que dans ma vie d’homme.
Par exemple ? J’ai fait des bêtises comme tous ceux qui ont grandi dans des quartiers sensibles peuvent en faire. Tout ça aurait pu mal tourner et finir dans la grande délinquance. J’ai des frères qui sont tombés dedans. C’est vraiment la foi qui m’a sorti de là.
Petit, vous alliez au catéchisme… Tous les mercredis, au lieu de traîner, j’apprenais la parole de Dieu. Et c’était important. Je me souviens d’une phrase soulignée dans mon Nouveau Testament. « Demandez et vous recevrez. » Elle m’a donné beaucoup de force.
Pour réaliser vos rêves ? Oui, le jour où j’ai signé mon premier contrat professionnel, j’ai pu offrir une maison à mes parents.
La foi a donc été le carburant de votre réussite ? C’est ce qui m’a donné confiance en moi à rebours des discours défaitistes et négatifs. Appuyé sur elle, je me suis donné les moyens de réussir. Avec cette petite étoile, j’ai mis toutes les chances de mon côté. J’ai fait tous les sacrifices disciplinaires, alimentaires, de l’hygiène de vie au goût du travail bien fait, en sachant que le Bon Dieu m’aiderait. C’est ce qu’Il a fait. Voilà plus de dix ans que je vis de ma passion et que je fais ce métier magnifique.
Enfant, donniez-vous déjà des coups de pied dans un ballon ? Je priais surtout le Seigneur en lui promettant d’être une bonne personne qui secourrait les autres, s’il m’aidait à devenir joueur professionnel. Maintenant j’essaie de tenir ma promesse. Je me sens redevable.
La ferveur, vous ne la gardez pas pour vous… Bien au contraire. Et maintenant que j’ai un fils, je suis en train d’organiser son baptême. J’ai envie de lui transmettre ces valeurs qui font à mes yeux la réussite d’une éducation. Une bonne éducation, c’est 80% d’une vie réussie. Pour moi, ça passe par la foi.
Dans la vie spirituelle, avez-vous eu des préparateurs ? À Saint-Étienne, j’ai croisé Mgr Lebrun qui parfois venait prier pour le club. On a pas mal échangé. Il m’a accompagné dans la foi. Ça a été très important pour moi. Il m’a aidé à croire. Il m’a donné quelques livres. J’ai beaucoup de respect pour les évêques et pour les prêtres. Ils sont comme mes entraîneurs spirituels. De temps en temps, je reçois un petit texto de leur part. Ça fait toujours plaisir de se sentir soutenu.
Votre terrain de prière ? Lourdes, où je vais souvent avec ma mère. Sinon, je me suis fait une petite chapelle chez moi. J’y fais ma petite prière. Ça m’apaise.
Et pendant le derby ? Souvent je me signe avant le match ou après les buts.
La religion impacte-t-elle votre jeu ? Oui, avec les arbitres… Certains font des erreurs parce que le jeu demande faute. Je me dis alors qu’il faut pardonner, et je fais attention aux mots que j’emploie. C’est dur. C’est la foi qui m’aide à garder la maîtrise de moi-même sur le terrain.
Et quand vous dérapez ? Il m’arrive de disjoncter. Je me reprends. J’ai eu des problèmes extra sportifs avec ma direction l’été dernier. La foi m’a aidé à tenir bon. « Dieu merci. On a franchi une étape. »
Hormis le ballon, des passions ? Des manques… Jeune, je n’étais pas un élève exemplaire. J’ai clairement négligé ma scolarité. Aujourd’hui j’ai des lacunes. J’entends bien essayer de les combler. J’ai repris les cours avec, pourquoi pas, l’objectif de passer le bac.
Des buts à atteindre ? Aider l’OL à se classer le mieux possible. Atteindre la barre des cent buts en ligue 1.
Que peut-on vous souhaiter ? De progresser et d’aider les autres à travers ma foi.
Noël chez les Gomis ? Comme d’habitude, je retourne auprès de mes parents. On va à la messe de minuit. On fait un repas ensemble. On partage.
Une assurance. Voir mon père aller fidèlement chaque week-end à l’église, malgré son vieil âge, et l’entendre me dire, en sénégalais : « T’inquiète, Dieu est là. Il va pourvoir à tout. »
Un rituel sénégalais ? Prier dans la grande cathédrale de Dakar.
Out of Africa… Je suis né en France, j’ai fait le choix de jouer pour l’équipe nationale française, mais je suis très attaché à l’Afrique. J’y retourne tous les trois mois. C’est un continent qui a beaucoup de richesses humaines, à défaut d’avoir beaucoup d’argent. Malgré leur dénuement, les Africains ont toujours le sourire et une foi incontestable.`
Vous marquez, vous twittez… C’est bien d’être à la page. Souvent après l’entraînement, par temps de pluie, on doit vite rentrer, on n’a pas le temps d’échanger avec nos fans. Les réseaux sociaux me permettent de leur transmettre des infos, des instantanés, des petits clins d’œil. Ça leur permet de me connaître sous un autre jour.
Un modèle ? Bernard Lacombe. Souvent je vais avec lui prier à l’église. C’est lui qui m’a emmené pour la première fois à Notre-Dame de Fourvière. Il a toujours eu cette belle et grande foi. C’est un grand monsieur dans le foot français. J’aimerais bien lui ressembler. Notamment pour son humilité.
Propos recueillis par Magali Germain pour l’1visible.