Une grande première pour cette rivière de pierres et de métaux précieux à la gloire du saint protecteur de la ville de Naples, qu’elle n’avait jamais quitté.
30/04/14
Le musée Maillol, à Paris, accueille jusqu’au 20 juillet prochain l’exposition « Les trésors de Naples : les joyaux de San Gennaro », une des plus grande collections de joaillerie du monde, qui a quitté Naples (Italie) pour la première fois afin d’être exposé à Rome puis à Paris.
C’est une des plus grandes collections de pierres et de métaux sculptés au monde, et elle n’appartient pas à une famille royale mais bel et bien aux habitants de Naples. Frappés par la guerre et la peste pendant les années 1526 et 1527 ils en appellent à l’un des sept saints patrons de la ville, San Gennaro (ou Saint Janvier). Par contrat dûment réalisé devant notaire, le saint, bien que mort en 305, s’engage à protéger la ville de la peste et du Vésuve, en échange de quoi le peuple de Naples lui constitue un trésor. Non content de perdurer à travers les siècles, ce trésor s’est enrichi de donations des rois et chefs d’états pieux ou simplement soucieux de s’attirer les bonnes grâces des napolitains. Selon les estimations des experts, sa valeur serait supérieure à celui de la couronne d’Angleterre.
Pourquoi une telle dévotion à ce San Gennaro ? Le saint martyr est surtout célèbre en raison du « miracle de la liquéfaction du sang », qui peut se produire trois fois par an (la prochaine cérémonie aura lieu samedi 3 mai). Le sang séché de San Gennaro conservé dans deux ampoules se liquéfie et parfois même entre en ébullition, sans intervention extérieure visible.
Ce fait inexpliqué n’est pas reconnu officiellement comme un miracle par l’Eglise catholique, mais il fait l’objet d’une grande dévotion des napolitains. Ils interprètent comme un bon présage le fait que le sang se liquéfie rapidement, et au contraire comme un présage de catastrophe l’absence de tout phénomène. Ils accompagnent les ampoules en cortège et l’évêque de Naples porte les reliques dans un ostensoir où elles sont examinées avec un intérêt mâtiné d’inquiétude. Le précieux ostensoir ne sera d’ailleurs pas visible durant la semaine de la cérémonie : il fait l’aller-retour à Naples, pas question pour les paroissiens de s’en passer !
Cette cérémonie qui réunit le peuple de Naples dans un cortège chamarré et plein de dévotion est à l’image du trésor dédié à San Gennaro : extraordinaire et extravagant. La collection expose des pièces comme le « collier de San Gennaro » qui n’a pas été porté par le saint de son vivant, mais offert dans le cadre du « contrat ». Cet objet a été réalisé à l’aide des dons de Charles V de Bourbon, Joseph Bonaparte, Marie-Caroline de Habsbourg, sœur de Marie-Antoinette, ou encore la reine Marie-Amélie de Saxe, auxquels ont été ajoutés ceux de Napolitains anonymes.
Au final, ce trésor de bustes baroques, de toiles de maîtres et de bijoux fastueux a aussi une immense valeur scientifique : préservé malgré les occupations et les catastrophes qui ont frappés la ville depuis le XVe siècle, c’est un magnifique témoignage de 500 ans d’histoire !