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Jean Paul II : un bloc de prière

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Le pape qui avait institué le dimanche de la Miséricorde divine était un grand priant.

Jean Paul II est mort comme il a vécu, en priant. C’est ce trait que je garde surtout de ce grand pasteur. Sa capacité de prière étonnait et sa grande intériorité pacifiait. Mon épouse et moi l’avons constaté lors d’une audience avec lui, quelques jours après la béatification de son amie Mère Teresa en octobre 2003. C’était dans le cadre de notre 25e anniversaire de mariage et lui le 25e de son pontificat. Je lui avait remis mon livre « J’ai soif. De la petite Thérèse à Mère Teresa ». Quelle émotion ! Il a regardé longtemps la couverture sur laquelle figurait celle qu’il avait béatifié et la petite Thérèse qu’il avait nommé docteur de l’Église.
 
D’autres l’ont dit avant moi, ce Polonais était un bloc de prière. Il pouvait prier partout, seul ou entouré de milliers de personnes, avec autant de profondeur. Ses proches ont souvent affirmé qu’on ne comprenait bien cet homme que si on l’avait vu en prière. Il portait le monde dans sa prière ardente, faite de silence, d’amour, de larmes, de soupirs.
 

Les racines polonaises

 C’est d’abord auprès de sa mère que le petit Karol, surnommé Lolek, apprend très tôt à faire sa prière. Le père prendra la relève au décès de son épouse en 1929. Son fils n’a que neuf ans. Tous les jours, il va à la messe avec lui, ils font ensemble la prière du soir, dorment dans la même pièce. La nuit, que de fois n’a-t-il pas vu son père à genoux ! Ce dernier lui transmet l’amour de Dieu et de la Pologne, le culte de la montagne et des pèlerinages à Marie.
 
Karol aimait fréquenter la chapelle du monastère des carmes à Wadowice. Il y trouvait là un silence qui nourrissait son cœur à cœur avec le Christ. Plus tard, il fera sa thèse de doctorat en théologie sur la foi dans la pensée du carme espagnol Jean de la Croix. Lorsque, durant la guerre, il étudiait clandestinement la théologie, il avait envisagé la vie monastique. Il gardera toute sa vie l’amour du silence et de la solitude, ces deux ailes de la prière profonde.
 
Nommé évêque de Cracovie en 1958, il choisit sa devise, extraite d’une prière à la Vierge de saint Louis-Marie Grignion de Montfort : « Totus tuus. Tout à toi. » Il fait ainsi référence à Marie, lui consacrant sa vie. Elle sera toujours là, protégeant et soutenant ce fils qui l’aime tant. Pour marquer l’entrée de sa vingt-cinquième année de pontificat, le 16 octobre 2002, il publie une lettre apostolique Rosarium Virginis Mariae, où il montre la place centrale du Rosaire dans sa vie : « Le Rosaire m’a accompagné dans les temps de joie et dans les temps d’épreuve. Je lui ai confié de nombreuses préoccupations. En lui, j’ai toujours trouvé le réconfort. Le Rosaire est ma prière préférée. C’est une prière merveilleuse. Merveilleuse de simplicité et de profondeur » (no 2).

Comment priait le pape ?

Ce premier pape venu de l’Est deviendra bien vite le pape du pardon, de la prière et de la sainteté. Quelques jours après son élection, il sort déjà du Vatican et se rend au sanctuaire marial de la Mentorella, près de Rome, pour y parler de la prière : « La prière est la première expression de la vérité intérieure de l’homme, la première condition de la liberté authentique de l’esprit. La prière donne un sens à toute la vie, à chaque instant, en toutes circonstances. »
 
À la question de Vittorio Messori : « Comment prie le pape ? » Jean-Paul II répond avec humour : « Il faudrait le demander au Saint-Esprit ! Le Pape prie comme l’Esprit Saint le lui permet . »
 
Dès son réveil, entre 5 h 30 et 6 h, il prenait une douche et se rendait à la chapelle pour une méditation. Il célébrait la messe tout de suite après, avec quelques invités. Après la messe, il restait un long moment en action de grâce. Il lui arrivait souvent, durant la journée, de se déplacer de son bureau à la chapelle pour prier, agenouillé sur son prie-dieu dans lequel les religieuses polonaises à son service plaçaient les intentions de prière du monde entier qui lui étaient transmises par courrier. Après une courte sieste, il sortait sur la terrasse aménagée par Paul VI; il y restait une heure, pour réciter son chapelet, lire son bréviaire, étudier les langues. Il consacrait souvent de longs moments à l’adoration du Saint-Sacrement. Sa journée se terminait vers 22 h 45 par la récitation des complies.

 
Dans son encyclique du Jeudi Saint 2003, L’Église vit de l’Eucharistie, il fit cette confidence : « Comment ne pas ressentir le besoin renouvelé de demeurer longuement, en conversation spirituelle, en adoration silencieuse, en attitude d’amour, devant le Christ présent dans le Saint-Sacrement ? Bien des fois, chers Frères et Sœurs, j’ai fait cette expérience et j’en ai reçu force, consolation et soutien ! » (no 25)
 
Successeur de Pierre, il donnait à la prière une dimension universelle. Sa prière empruntait la géographie du monde et se penchait sur les problèmes contemporains. Fait unique dans l’histoire, il organisa à Assise des rencontres avec les chefs des autres religions pour qu’ensemble ils prient et jeûnent pour la paix dans le monde. Le 19 août 1985, il affirma à plus de cinquante mille jeunes musulmans du Maroc : « L’homme ne peut pas vivre sans prier. » Il multiplia les gestes de pardon, dont celui accordé à son agresseur Ali Agça, dans la prison de Rome. Mais l’image la plus forte de son pontificat restera peut-être sa visite à Jérusalem où, le 26 mars 2000, il se rendit devant le mur des lamentations et y déposa dans un creux du mur une prière par laquelle il implorait le pardon de Dieu pour toutes les fautes commises contre les Juifs, le peuple de l’Alliance.
 
Ces actions prophétiques étaient les fruits de sa prière contemplative. Toute sa vie aura été brûlée par la foi, que la prière aura rendue encore plus incandescente, malgré l’âge et la maladie de Parkinson. Comment rendre compte de ce mystère de la prière qui appartient au mystère de la foi? La mort emporte toujours avec elle le secret de la prière comme un manuscrit resté caché, un poème inachevé.

Un art de la prière


Dans sa lettre apostolique Au début du nouveau millénaire, qui est un peu son testament, Jean-Paul II voyait « un christianisme qui se distingue avant tout dans l’art de la prière » (no 32). Il avait remarqué qu’il y a dans le monde « une exigence diffuse de spiritualité, qui s’exprime justement en grande partie dans un besoin renouvelé de prière » (no 33). Il y voyait là un signe des temps. Il en appelait à la grande tradition mystique de l’Église. Cette tradition, autant en Orient qu’en Occident, « montre comment la prière peut progresser, comme un véritable dialogue d’amour, au point de rendre la personne humaine totalement possédée par le Bien-Aimé divin, vibrant au contact de l’Esprit, filialement abandonnée dans le cœur du Père » (no 33).
 
Jean Paul II voulait que les communautés chrétiennes deviennent « d’authentiques écoles de prière, où la rencontre avec le Christ ne s’exprime pas seulement en demande d’aide, mais aussi en action de grâce, louange, adoration, contemplation, écoute, affection ardente, jusqu’à une vraie “folie” du cœur » (no 33).
 
À la surprise générale, le pape de la prière avait décidé de consacrer une année de l’Eucharistie en 2005. C’est au milieu de cette année qu’il a rencontré face à face le « divin Voyageur », d’après son expression dans sa brève Lettre apostolique d’une rare intensité spirituelle, synthèse de tout son pontificat : Reste avec nous Seigneur. Sa vie se termina par cette prière de demande. Nul doute que dans la communion des saints, il veille sur cette Église qu’il a tant aimée, à la suite du Christ.
 
 

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