Il y a dix ans, Angela Seracchioli imaginait un chemin Franciscain à travers l’Italie…15/03/2014
Pour l’italienne Angela M. Seracchioli, un pèlerinage, ce n'’est pas un simple passe-temps, ni même une passion. C'est un choix de vie. Depuis qu’elle a foulé en novembre 2002 la terre de Saint-Jacques-de -Compostelle, sa vie a été radicalement bouleversée.
Elle avait alors commencé le pèlerinage en France, et après un mois de rude marche, accompagnée de fortes pluies et parfois de neige, elle avait atteint la tombe de l’apôtre. Ce fut un pèlerinage solitaire, avec bien peu de rencontres personnelles mais très enrichissantes, durant lequel Angela Seracchioli était convaincue que sa mère, décédée il y a cinq ans, et Saint François d’Assise marchaient avec elle.
"Je ne sais pas si c’était le fruit de mon imagination, un jeu de mon esprit, une vision… Je ne sais pas, je sais seulement que j’ai découvert que Saint François avait toujours été présent au cours de ma vie, par de petits signes, et qu’il venait me rencontrer sur le chemin. »
De retour dans son village de montagne en Italie, où elle avait décidé de s’installer peu avant de partir en pélerinage, elle n’arrivait pas à retrouver ses marques : « Je sentais que ma vie devait changer, mais je ne savais pas comment ni où… J’étais totalement découragée. » C’est ainsi qu’au printemps 2003, elle a décidé d’entreprendre une nouvelle aventure : marcher en empruntant les lieux que son « compagnon de route, François » avait parcouru des siècles avant elle.
En fait, il n’existait alors aucun parcours établi. C’est ainsi qu’elle décida d'en créer un en partant de rien. Elle prit les Sources Franciscaines et traça pour elle un itinéraire, sans penser un instant que d'autres l'emprunteraient. « Je suis partie sans carte et sans savoir où je dormirais, affirme Angela. Je me suis perdue tant de fois, mais je marchais le cœur léger et les gens m’accueillait chez eux, c’était merveilleux ! »
Un chemin vierge
Alors qu’elle marchait sur les pas du Pauvre d’Assise, l’éditorial Terre di Mezzo, spécialisé dans les guides de voyages, prit contact avec elle pour lui proposer d’écrire le premier guide du Chemin Franciscain. « Un chemin, explique l’auteur, qui traverse une très belle partie de l’Italie, qui permet de suivre et de découvrir la vie de Saint François mais également de sublimes villes qui se révèlent être d’’authentiques bijoux d’art ».
L’itinéraire proposé par Angela Seracchioli commence à la Verna, en Toscane où Saint François a reçu les stigmates. C’est le lieu le plus mystique lié au Poverello, situé au sommet d’une colline rocheuse, en plein cœur de la forêt. De là, on se dirige vers Sansepolcro et Gubbio, terre d’ermites et de beauté, pour rejoindre peu après Assise, étape majeure et cœur du pèlerinage.
Une fois arrivé à Assise, direction le sud, pour découvrir d’autres lieux significatifs de la vie du Saint : Spello, Trevi Spoleto puis arrive ensuite Poggio Bustone, après être passé par Greccio, où Saint François a créé la première crèche. Puis Fontecolombo, où il écrivit les Règles.
Au total, on compte sur ce chemin 350 kilomètres divisés en 17 étapes, qui arpentent la Toscane, l’Ombrie et le Lazio. Le guide, publié en mai 2004, et qui va bientôt déjà sortir sa cinquième édition en italien, s’intitule Di qui passò Francesco (« Ici, est passé François »). Très complet, il offre une description détaillée de chaque étape, en plus des cartes et des lieux où il est conseillé de s’arrêter. Mais ce nouveau chemin ayant été créé il y a à peine dix ans, il n’existe pas encore un réseau d’hôtels comme on peut en trouver sur le Chemin de Compostelle.
Le guide propose également pour chaque étape des extraits des Sources Franciscaines qui, au travers des paroles de ses premiers biographes, racontent ce qui s’est passé sur chaque lieu. « Saint François, précise Angela Seracchioli, a vécu toute sa vie à l’image d’un pèlerin et d’un étranger, il n’avait pas d’abri ni de maison stable, il était toujours en route."
L’auteur souhaite mettre l'accent sur cet aspect peu connu du Saint. Il y a quelques mois, elle a osé envoyer quelques exemplaires de son guide au Pape : « Je crois que ce parcours lui plairait beaucoup. »
Plus de 13 300 pèlerins
Séduite par le Chemin Franciscain, Angela Seracchioli déménage en 2005 à Assise dans le but d’aider les pèlerins. Pendant cinq ans, elle a accueilli les pèlerins dans une auberge authentique, dans le même esprit de celles qu’elle avait découvertes sur le Chemin de Compostelle.
« Là-bas, on dormait et dînait selon les disponibilités, explique-t-elle. L’endroit était tout petit, mais toujours plein. Même les pèlerins dormaient par terre et des volontaires du monde entier sont venus m’aider, dont certains venant d’Espagne." De là-bas, elle envoyait les informations à qui voulait et ses pas solitaires sont alors devenus une “mission de vie”.
Actuellement, en attendant d’ouvrir un nouvel hôtel, Angela Seracchioli continue de se dédier aux pèlerins : elle envoie les informations, répond aux e-mails, s’occupe du site internet du Chemin (www.diquipassofrancesco.it) et lorsqu’elle peut, elle accueille même toujours chez elle les pèlerins.
Depuis 2004, l’Association des amis du Chemin de François a compté plus de 13 300 pélerins. Malgré le relief montagneux en Italie, avec peu de plaines mais de nombreuses collines, le Chemin Franciscain est adapté pour tous les âges. « C’est pour tout ceux qui savent marcher et qui ne s’attendent pas à un parcours plat, explique sa créatrice. Mais il ne faut pas le comparer avec celui de Compostelle. C'est un chemin différent, mais très beau. Il faut le parcourir vierge, sans faire de comparaisons et ce sera très plaisant ! »
Pour cette pèlerine italienne intrépide, la reprise des chemins de pèlerinages aujourd’hui n’est pas la réponse à une simple tendance passagère. « L’homme moderne cherche. Il y a aujourd’hui une nécessité de se retrouver soi-même et, ce faisant, de rencontrer de nouveau Dieu. J’ai connu des milliers de pèlerins et vu se succéder des miracles dans les cœurs des gens, et notamment dans ceux qui ne partaient pas par foi. »
Angela soutient que faire un pèlerinage est un appel : « Souvent, tu ne sais pas pourquoi tu pars, et ce fut mon cas. Mais quelque chose se passe ensuite et te fait devenir un pèlerin pour toujours, même lorsque tu ne marches pas. »
« Le sac à dos de ta vie devient alors plus léger. Tes priorités et tes valeurs changent, tu n’es plus le même et tu découvres que tu vas vers un chemin spirituel qui est en train de naître dans ton cœur. Puis tu prends la voie que tu dois prendre dans la vie et, cette expérience de peu de jours aura marqué ta vie profondément et… Tu n’es plus le même qu'à ton départ. »
Traduit de l’édition italienne d’Aleteia par Mathilde Dehestru