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Sorties cinéma : Monument’s Men, pas vraiment monumental

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David Ives - aleteia - publié le 07/03/14
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Le dernier film de George Clooney n’arrive pas vraiment à expliquer pourquoi des hommes ont risqué leur vie pour des œuvres d’art.Il n’est donc pas surprenant, au vu de sa description, que l’Agneau Mystique de Gand ait attiré l’attention d’Adolf Hitler.
Selon l'ouvrage d’histoire de l’art « Gardner’s Art Through Ages », «parmi les polyptyques flamands, le plus grand et le plus admiré figure l’Agneau Mystique de la Cathédrale Saint Bavon, à Gand en Belgique. […] Cette œuvre célèbre tout le cycle chrétien, du Péché originel jusqu’à la Rédemption, montrant l’Église triomphante dans la Jérusalem céleste. L’étrange naturalisme et la précision du rendu, de la pure tradition miniaturiste, rend ce grand évènement aussi concret et plausible que possible pour l’observateur. Le réalisme est tellement saturé de symbolisme que nous pouvons presque penser à une super-réalité ou à du surréalisme, car ce qui est donné à l’œil est supérieur à ce que l’œil peut entrevoir. » Et, au-delà de tout ceci, l’Agneau Mystique est tout simplement magnifique.  
 

L'Agneau Mystique, 1432. Position ouverte

Maintenant, quand on pense au Führer, « amateur d’art » n’est pas vraiment le premier terme qui vient à l’esprit. On penserait plutôt à « fou », « monstre », ou encore « maniaque génocidaire ».  Mais selon sa propre estimation, et malgré le fait qu’il ait lui-même été refusé à l’académie des Beaux-Arts de Vienne du fait de son manque de talent, Hitler se considérait comme un homme qui savait reconnaître une belle œuvre d’art quand il en voyait une.
Alors, naturellement, dès qu’il s’est mis à essayer de conquérir le monde, Hitler a pensé qu’il était tout à fait normal qu’il possédât toutes les plus belles œuvres d’art jamais réalisées. Pour cela, il chargea en 1940 l’Einsatzstab Reichsleiter Rosenberg pour les Territoires Occupés de piller purement et simplement les musées et les collections privées d’Europe. Ils ramenèrent en Allemagne les objets qu’Hitler avait approuvé – travaux de Grands Maîtres, comme l’Agneau Mystique – et brûlèrent tout bonnement nombres d'œuvres modernes, considéré comme dégénéré. 
 
Bien sûr, une fois que cela commença à se savoir, les historiens de l’Art et les professeurs du monde entier essayèrent de sauver ce qu’ils pouvaient des griffes nazies. Cependant, il devint rapidement évident qu’ils allaient avoir besoin d’une aide militaire pour récupérer les dizaines de millier d’œuvres que l’armée allemande avait déjà dérobé. Après une intense campagne de lobbying, on réussit à convaincre le président américain de mettre en place ce qui devint finalement le Monuments, Fine Arts, and Archives Program – une branche des forces armées qui devait protéger les biens culturels des ravages de la guerre, mais aussi trouver et récupérer les œuvres d’art volées. Il faut dire que, jusque là, les bombardiers et les tanks alliés ne s'étaient pas extrêmement inquiétés si, tout en rasant leur cible principale, quelques musées y passaient aussi…
 
The Monument’s Men, le nouveau film réalisé par Georges Clooney, et dans lequel il joue également, raconte l’histoire d’une poignée de ces historiens alors qu’ils recherchent des indices pour localiser les trésors volés, entre autre La Madone de Bruges de Michel-Ange, et l’Agneau Mystique. C’est un périple qui les fait passer par l’entraînement militaire basique (malgré l’âge avancé de certains de ces hommes), puis par le Paris occupé, pour les emmener jusqu’aux première lignes de la guerre, où ils doivent risquer leur vie comme n’importe quel autre soldat. C’est une page de l’Histoire indéniablement intéressante, qui met en lumière le récit presque oubliée de ces hommes qui étaient prêt à se mettre en danger mortel pour protéger des objets que beaucoup considéreraient comme jetables.
 
Malheureusement, alors que l’histoire vraie derrière le film est fascinante, le film en lui-même n’est pas vraiment à la hauteur du potentiel du récit. En plus de George Clooney, le film peut se targuer d'aligner un impressionnant casting de vétérans des têtes d’affiches (Matt Damon, Bill Murray, John Goodman, Cate Blanchett) et quelques autres têtes toutes aussi familières (Jean Dujardin, Bob Balaban, Hugh Bonneville) – et aucun n’est mauvais dans son rôle. Le problème, c’est qu’ils ne sont pas particulièrement bons non plus.

Dans ce qui semble avoir été une décision prise en toute conscience, tous les Monument's Men sont joués d'une manière excessivement modéré, comme si le sujet était si grave qu’aucune pointe de personnalité ne pouvait être autorisée à se démarquer, par peur de le dénigrer. Seul Hugh Bonneville, de la série Downtonw Abbey, dont le personnage est un ex-alcoolique qui voit la mission comme une possibilité de rédemption, semble avoir donné un peur de profondeur à son personnage. Mais pour les autres, les interprétations sont tellement fades que vous pourriez intervertir les acteurs dans n'importe quelle scène, ça ne changerait rien. C’est une offense assez impardonnable quand on possède dans son film des acteurs comme Bill Murray ou John Goodman.
 
Mais ce qui est peut-être encore pire, c’est que le film ne retransmet jamais à quel point la mission des Monument’s Men était si importante. Pourquoi elle était importante, ça on vous le dit ; toutes les quinze minutes environ, Clooney (acteur) fait un petit discours, expliquant pourquoi l’art représente l’héritage culturel de l’humanité, et les traces de nos aspirations en tant qu’espèce, et ô combien il est nécessaire de protéger et de sauver ces œuvres pour les générations futures, même si cela implique de mettre en danger nos propres vies… Mais ce que Clooney (réalisateur) ne fait pas, c’est vous le faire ressentir.
 
Il est écrit dans le Catéchisme de l’Église Catholique : « "Créé à l’image de Dieu " (Gn 1, 26), l’homme exprime aussi la vérité de son rapport à Dieu Créateur par la beauté de ses œuvres artistiques. L’art, en effet, est une forme d’expression proprement humaine ; au de-là de la recherche des nécessités vitales commune à toutes les créatures vivantes, il est une surabondance gratuite de la richesse intérieure de l’être humain. Surgissant d’un talent donné par le Créateur et de l’effort de l’homme lui-même, l’art est une forme de sagesse pratique, unissant connaissance et savoir-faire (Sg 7, 18) pour donner forme à la vérité d’une réalité dans le langage accessible à la vue ou à l’ouïe. L’art comporte ainsi une certaine similitude avec l’activité de Dieu dans le créé, dans la mesure où il s’inspire de la vérité et de l’amour des êtres.»
 
En résumé, Dieu se reflète dans le miroir des créations artistiques, et regarder les plus belles de ces créations, comme l’Agneau Mystique, c’est entrevoir quelque chose de divin dans le monde. Que ce soit parce que Clooney n’a pas compris cette dimension de l’Art, ou parce qu’il n’a pas su comment la traduire à l’écran, The Monument's Men n’est pas vraiment un argument convaincant pour ce thème, de même que le film en lui-même ne le sert pas vraiment. : plutôt que de raconter la saga d’hommes héroïques se battant pour sauver la présence divine dans un monde qui en a grandement besoin, le film apparaît plus comme l’histoire d’un groupe d’homme quadragénaire prêt à mourir pour quelques jolis tableaux.
 
Et c’est dommage, car l’histoire des Monument's Men vaut vraiment le détour. Et rien que pour ça, le film est sympathique à regarder – en tout cas, un dimanche soir quand il passera à la télé. C’est juste qu’il aurait pu et dû être meilleur. Alors que l’histoire vraie des Monument's Men est captivante, le film, comme la performance des acteurs, tombe malheureusement un peu à plat. 

Quand il n'est pas en train d'écrire des articles pour Aleteia, David Ives tient un blog cinéma : The B-Movie Catechism
Traduit de l'édition anglaise d'Aleteia par Paul Monin. article original ici. 

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