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La dépression vaincue par la foi ?

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Patricia Navas González - publié le 28/02/14
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La foi peut aider, mais normalement ne la guérit pas, de même qu’elle ne guérit pas une grippe
28/0272014

Pourquoi je me sens triste? une question que je me répète souvent. J'ai tout: une famille qui m'aime, un mari qui est un trésor, un enfant qui vaut tout et un autre en route… Je me sens encore plus mal quand je vois tout ce que j'ai et qu’il n'y a aucune raison apparente … " . La sensation que décrit  Paola n’est pas un simple état d’âme persistant, mais une dépression, un trouble mental de jour en jour plus fréquent, qui touche plus de 350 millions de personnes dans le monde, selon l'Organisation mondiale de la Organisation de la Santé (OMS).
 
« Il y a des moments qui ne sont pas faciles: on sait même pas pourquoi on se sent mal –poursuit Paola: dans mon cas, je suis prise d’angoisse dès que je me retrouve avec du monde,  même avec ma famille. Au contraire, d'autres  ressentiront le besoin d’avoir des gens autour d’eux : la dépression n'est pas la même chose pour tout le monde.

Même si les symptômes sont différents, le psychologue et théologien Eduard Fonts explique que celui qui souffre de dépression « perd toute envie de vivre et d’être en contact avec d’autres, et vit toute chose comme une obligation et une exigence difficile d’assumer et de mener à bien ».

En fait, la dépression est à l’heure actuelle la principale cause d'invalidité. Elle provoque souvent une grande souffrance, perturbe les activités professionnelles de travail, scolaires et familiales.  

Paola reconnaît les limitations qu’elle comporte – physiques et mentales-: « Vous essayez de prendre sur vous et de vous adapter aux circonstances, mais plus vous faîtes des efforts, plus ça vous est difficile… tandis qu’affluent les questions: Pourquoi moi? Que se passe-t-il, le Seigneur ne m’écoute pas? »…

Luis, un économiste de Barcelone, qui a souffert d’une dépression récurrente pendant plus de vingt ans, souligne l'importance d'accepter la dépression comme une maladie. « J'ai beaucoup voyagé, et je pensais que les problèmes étaient liés aux lieux, ou à l’entourage, mais j'ai réalisé qu'ils étaient en moi, que je les emportais dans ma valise » explique-t-il.

 Il se souvient : « Je broyais du noir, et surtout j’avais perdu l’espérance. Vous pensez avoir fait quelque chose de mal, mais c’est une erreur et vous devez enlever ça de votre tête tout de suite ».

Son expérience lui a appris une chose: il ne faut pas se dissimuler sa maladie: « ne pas avoir recours au travail, en se disant qu’il s’agit d’un rhume ou autre…Les blessures doivent s’oxygéner, c’est comme ça qu’elles guérissent ».
 
Le psychologue Fonts aborde ces blessures psychiques au séminaire « Soigner les blessures, retrouver  l’estime de soi », où il enseigne à la ‘Cueva de San Ignacio’ (la grotte de saint Ignace) de Manresa.

Il explique : « notre monde intérieur est rempli de forces inconscientes multiples, d'expériences désordonnées qui se sont accumulées au cours des années de douleurs, pertes, déceptions, peines et tristesses, et aussi défis et complexes… qui, à notre insu, se sont mélangées  en restant cachés au-dedans de nous, sans que nous en ayons conscience et sachions pour quoi ; mais  ces expériences conditionnent notre vie  ainsi que nos relations et nos choix… ».

« D’où l’importance de traiter nos blessures –déclare le psychologue à Aleteia, ces expériences qui nous ont fait du mal et qui, que l’on en soit conscient ou pas, ont déterminé et déterminent dans une large mesure notre vie”. C’est à partir de ces expériences que l’on retrouve « l’estime de soi, l’image que nous avons de nous-mêmes, comment nous percevons et, par là même, comment nous faisons face aux défis, difficultés et joies de tous les jours ».
 
Le soutien psychologique et un traitement psychologique peuvent aider, mais les cas de dépression modérée ou grave nécessitent en plus un traitement médical: « Comme pour toute autre maladie, parfois il faut suivre un traitement. Certains m'ont dit que non, qu’il s’agit d’une question de volonté ou de combat, mais c'est précisément ce qui est perdu d'abord, et on n’aime pas se l’entendre dire ».

Beaucoup de gens ont du mal à comprendre cette maladie. “ Souvent on la met sur le dos de la paresse, de la volonté d’éviter les problèmes…explique Fonts-. Par ailleurs, les maladies psychologiques font autant ou davantage peur que les physiologiques, et on a tendance à les ignorer, sans compter que la société ne les accepte pas trop et qu’elle sont mal vues aujourd’hui ».. .

Fort de sa longue expérience, Luis assure que « aujourd'hui, il existe de nombreux traitements efficaces pour la dépression et que l’on peut  mener une vie normale : sentimentale, professionnelle, sociale … ».

 Dans ce sens, Fonts remarque que la foi peut aider, mais ne résoudra pas  tout, comme elle ne résout pas un problème de voiture ni ne guérit la grippe.

 Il prévient : “Une des erreurs que l’on commet souvent est de croire qu’avec la foi il ne se passera rien. Mais quand vous n'avez pas envie de faire des choses ou d’affronter la dure réalité de la vie quotidienne, cette idée peut conduire à un sentiment de culpabilité"

 Et d’expliquer : « Bien sûr, la foi peut nous aider à certains moments à avoir une espérance solide; mais, à y regarder de plus près, on peut se rendre compte  que la personne déprimée est tellement bas qu’elle vit une obscurité et des ténèbres qui affectent toutes ses croyances, ses comportements, ses ressources pastorales et son  sens de la vie, sans qu’elle le sache ou puisse faire quoi que ce soit ».

En ce qui concerne les causes de cette souffrance,  Fonts explique que la dépression s’explique par des causes internes, souvent ignorées, ou par des situations extérieures dures et difficiles à assumer. Pour lui, les facteurs davantage physiologiques et chimiques auraient une incidence sur une dépression.

 Paola reçoit la foi comme une lueur dans l’obscurité. « Si ce n’était pas la foi, je ne serais pas ici–avoue-t-elle  -: par la foi je sais que Dieu veille sur moi, qu’il est à mes côtés et me porte dans ses bras ; et cela je l’observe au quotidien, ce ne sont pas des choses extraordinaires : les regards de mon mari, le sourire de mon fils … ».

 Pour Luis, « la foi est très empirique: elle n’est pas tant savoir qu’expérience ». Il souligne que « celui qui a la foi, doit accepter la maladie comme la pierre accepte le ciseau du sculpteur: on passe alors de porter sur soi toute la tristesse du monde, à avoir des forces réduites mais une vie à vivre ”.
 
Avec du recul, il reconnaît qu’il y des choses pour lesquelles remercier pour la dépression : « elle m'a permis d'avoir une relation plus profonde avec Dieu, reconnait-il. D’avoir un lien direct avec l’humanité du Christ, qui est aussi blessure, avec le cœur d’homme du Christ, blessé par nos injustices » .

 « Avec la dépression, la famille souffre, beaucoup de choses sont déréglées, y compris r la relation de couple », reconnaît-il. Mais en même temps, j'ai reçu le soutien de ma mère et de ma femme, et j'ai expérimenté l'importance de la maternité ; j’ai pu mieux comprendre l’Eglise et Marie, la Mère de Jésus,  de leur nature protectrice, et comment la critique peut être douloureux pour l'Eglise, , en particulier quand elle vient de ses  propres enfants ».
 
Il explique aussi que traverser cette maladie lui a permis d’avoir des rapports plus profonds avec les autres: « Dans le regard d’une personne, vous pouvez voir qu’elle a souffert », dit-elle.
 
Et il conclut : « On ne savoure pas certaines bénédictions de Dieu comme par exemple une bonne santé, mais oui celle de voir avec joie d’autres réalités ».

Article traduit de l'espagnol par Elisabeth de Lavigne

 

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