Faute de réels pouvoirs d’enquête sur la surveillance des citoyens européens par les Etats-Unis, le Parlement n’a pu contraindre certains témoins à coopérer, dont des chefs des services secrets des Etats membres.14/02/2014
La Commission des libertés civiles du Parlement européen vient d'approuver son rapport final après six mois d’enquête sur la surveillance massive de citoyens de l'UE par l’Agence nationale de sécurité américaine et par les services secrets des Etats-membres.
Tout en condamnant fermement la collecte systématique et généralisée de données personnelles de personnes innocentes, le rapport formule un certain nombre de recommandations. Il réclame, entre autres, un solide contrôle démocratique et un meilleur alignement des législations nationales et des pratiques régissant les activités de renseignement aux impératifs des droits fondamentaux et notamment le droit à la vie privée et la protection des données, la démocratie et l’Etat de droit.
"Cette surveillance de masse des citoyens de l'UE, aveugle et sans précédent, a montré à quel point il est primordial de disposer de mécanismes de contrôle démocratique solides tant au plan national qu'européen", a déclaré Sophie In 't Veld, porte-parole de l'ADLE sur le dossier. En outre, "le Parlement doit disposer d’outils appropriés afin de mener des enquêtes à part entière, lors desquelles il peut convoquer des témoins et les entendre sous serment", a poursuivi Mme In't Veld qui a proposé un amendement à ce propos.
Le rapport réclame dès lors, "une extension de ces pouvoirs d'enquête afin de couvrir sans aucune restriction ou exception, tout domaine de compétence ou toute activité de l'Union et d’inclure la possibilité d'interroger sous serment." "Jusqu'à présent le Parlement européen a été la seule institution démocratiquement élue dans l'UE à réellement faire face à cette situation en procédant à une enquête. Malheureusement, le Parlement manquant de réels pouvoirs d'enquête parlementaire, il n'a pu contraindre certains témoins à coopérer, dont des chefs des services secrets des Etats membres, des sociétés privées et l’Agence nationale de sécurité américaine" a expliqué Mme In 't Veld.
Par ailleurs, a-t-elle poursuivi : "Les violations des droits fondamentaux des citoyens comme celles mises à jour par les révélations de M. Snowden, n'auraient jamais été découvertes s'il n'y avait pas eu quelqu’un pour donner l’alerte et des journalistes disposés à écrire sur ce sujet, malgré les éventuelles menaces. Cela montre l'importance cruciale d’une amélioration de la protection de la liberté de la presse et des informateurs. Enfin, il est crucial de protéger la confidentialité contre la surveillance de masse de certaines professions réglementées telles que les médecins ou les avocats".
En ce qui concerne les accords et les arrangements UE-États-Unis, a conclu Sophie in 't Veld: "Ces dernières années, l’ADLE a sans cesse dénoncé le fait que la sphère de sécurité ne fonctionnait pas. La seule mesure crédible que la Commission puisse prendre pour démontrer son intention sincère de résoudre cette situation, est de suspendre les accords actuels avec l’UE qui ont facilité la collecte systématique des données personnelles".
Le rapport réclame une suspension immédiate de la sphère de sécurité, ou de l'accord TFTP, et souligne également que l'approbation du Parlement européen concernant l'accord UE-États-Unis (TTIP) pourrait être compromise tant que cette surveillance de masse généralisée ne sera pas définitivement arrêtée et qu’une solution adéquate ne sera pas trouvée. Parmi les recommandations, le rapport réclame également le lancement d'un "Habeas Corpus numérique européen", protégeant les droits fondamentaux à l'ère numérique et l'élaboration d'une stratégie européenne pour davantage d’indépendance de l'information.