Le phénomène touche de plus en plus de mineurs : « Mon fils subissait un lavage de cerveau sur internet depuis le mois de décembre », déclare le père d’un des deux jeunes toulousains récupérés en Turquie.
29/01/2014
Les deux jeunes toulousains de 15 et 16 ans, partis il y a plus de deux semaines pour rejoindre des groupes djihadistes en Syrie, ont été retrouvés : tous les deux récupérés en Turquie, l’un avant d’avoir pu rejoindre le front, l’autre après quelques jours passés en Syrie mais sans avoir participé aux combats.
Ces adolescents seront sans doute poursuivis pour « participation à une association de malfaiteurs en vue de la préparation d'actes de terrorisme », selon la loi relative à la sécurité et à la lutte contre le terrorisme de 20122, votée après l’affaire Merah. Celle-ci a été comme un électro choc pour l’opinion publique et pour les autorités françaises face à un phénomène qui touche de plus en plus de jeunes : des Français mais aussi des Allemands, des Anglais, des Belges, des canadiens, des australiens, des américains… Et les candidats sont de plus en plus jeunes, révélait le ministre de l’Intérieur, Manuel Valls, le 19 janvier.
Le chef de la lutte antiterroriste de l’Union européenne, Gilles de Kerchove, confirme : la France serait en effet l’un des plus gros « fournisseurs » de contingents, avec l’Irlande et le Royaume-Uni. Les régions de France les plus touchées seraient le Nord, l’Est, le Sud-est et Toulouse. (Valeurs Actuelles).
70 à 80 d’entre eux seraient de retour « aguerris et exaltés par des mois de propagande wahhabite, volontaires pour le martyre, qui leur garantit l’accès direct au paradis d’Allah … Certains d’entre eux deviennent même des « recruteurs au jihad », affirme le spécialiste.
« Nous pouvons être dépassés par ce phénomène vu l'ampleur, nous Français et Européens », a reconnu récemment Manuel Valls, sur Europe 1. Aujourd’hui le gouvernement français chiffre à 700 (chiffre sous-estimé selon divers chercheurs), le nombre de candidats français et étrangers partis de France pour combattre en Syrie. Une vingtaine sont déjà morts au combat. Combien seront-ils demain à partir et à mourir ? Et qu’est-ce qui pousse un adolescent à s’engager ?
Le père d’un des deux jeunes toulousains récupérés le weekend dernier affirme que son fils subissait « un lavage de cerveau sur internet depuis le mois de décembre », ce qui confirmerait la thèse du juge spécialiste de la lutte anti-terroriste, Marc Trévidic, rapportée par Valeurs actuelles ; la durée du conflit en Syrie laisserait « le temps aux groupes islamistes de s'organiser et donc de recruter massivement, via notamment des vidéos sur Youtube qui appellent à la guerre sainte. Et si le recrutement concernait au départ de jeunes désœuvrés entre 15 et 25 ans, il s'agirait à présent de jeunes gens bien intégrés.
« On a affaire à des jeunes qui s'autoradicalisent sur les sites salafistes et cèdent à la tentation de l'engagement armé et de l'aventure sur le terrain en consultant les sites des rebelles djihadistes ou de leurs sponsors d'Arabie Saoudite ou du Qatar », explique à Sud-Ouest, Alain Chouet, ancien chef du service de renseignement de sécurité de la Direction générale de la sécurité extérieure (DGSE), qui a été en poste en Syrie.
« Les réseaux islamistes ont énormément investi la Toile… Ils ont leurs propres sites, envoient des messages pour inciter les jeunes, mais ne vont pas forcément les chercher sur d'autres sites. Et il ne faut pas sous-estimer non plus le prosélytisme dans les collèges et lycées », alerte pour sa part Fabrice Balanche, maître de conférences à l'Université Lyon 2 et directeur du Groupe de Recherches et d'Etudes sur la Méditerranée et le Moyen-Orient (GREMMO).
Dans un entretien publié ce mercredi par Atlantico, Michel Maffesoli, sociologue, membre de l'Institut universitaire de France, et Farhad Khosrokhavar, sociologue franco-iranien, directeur de recherche à l'EHESS, s’essaient à un décryptage. On constate chez les jeunes en général « une recrudescence du goût pour le secret, pour les groupes initiatiques, ésotériques, les sociétés secrètes… ». Selon eux, cet engagement des jeunes au djihad syrien, est l’expression d’une volonté d’appartenance communautaire, d’une jeunesse en perte de repères sociaux, et en quête de valorisation.
Lire entretien directement sur le site : ICI
Au niveau européen, la Commission européenne a demandé aux États membres d'intensifier leurs efforts dans la lutte contre la radicalisation et l'extrémisme. Un programme européen de 20 millions d'euros devrait bientôt être mis en place pour combattre le phénomène.
D’après €urActiv, certains gouvernements proposent diverses solutions au niveau national. Certains mettent en place des formations pour les travailleurs sociaux qui sont en première ligne dans la lutte contre les groupes radicaux. La lutte contre la propagande terroriste sur Internet et le recrutement de victimes des violences terroristes dans le cadre de leurs activités de sensibilisation sont également prévus.
Sources : Valeurs actuelles – Atlantico – Sud Ouest