Noël, le martyre des chrétiens, les femmes “cardinales”, son prétendu “marxisme”…Dans une interview accordée à Andrea Tornielli pour La Stampa, le pape François met les points sur les i.Une nouvelle interview surprise du pape François a été publiée le 15 décembre 2013. Le souverain pontife a confié au vaticaniste Andrea Tornielli sa conception de Noël, et s'est exprimé sur les diverses affaires en cours, notamment sur les martyrs chrétiens et sur les récentes critiques l'accusant d’être marxiste !
Aleteia présente les 11 points fondamentaux de cette interview, que vous pourrez retrouver intégralement (en italien et en anglais) sur le site La Stampa.
1. Le Pape prévoit de se rendre en Terre Sainte, tout comme l’avait fait Paul VI il y a bientôt cinquante ans :
« Nous ne pouvons penser à Noël sans penser à la Terre Sainte. Il y a cinquante ans, Paul VI a eu le courage de s’y rendre, et c’est ainsi qu’a débuté l’époque des voyages papaux. Moi aussi je désire y aller, pour rencontrer mon frère Bartholomée, patriarche de Constantinople, et commémorer avec lui ce cinquantenaire, en reproduisant l’accolade entre le pape Montini et Athënagoras, à Jérusalem, en 1964. Nous nous y préparons ».
2. Il se défend d’être marxiste.
Certains passages de l’« Evangelii Gaudium » lui avaient valu plusieurs attaques en ce sens , surtout aux Etats-Unis : « Le marxisme est une idéologie erronée. Mais dans ma vie j’ai connu de nombreux marxistes qui étaient des gens bien, et en cela je ne m’en offense pas. […] Dans l’exhortation, il n’y a rien que l’on ne retrouve dans la Doctrine sociale de l’Église. Je n’ai pas parlé en tant que technicien, j’ai tenté de présenter un cliché de ce qui se passe. […] Et cela ne signifie pas être marxiste ».
3. L’unité des chrétiens est une priorité.
« Aujourd’hui, il existe un œcuménisme du sang. Dans certains pays, on tue les chrétiens parce qu’ils portent une croix ou possèdent une Bible, et avant de les assassiner, on ne leur demande pas s’ils sont anglicans, luthériens, catholiques ou orthodoxes. Le sang est mêlé. Pour ceux qui tuent, nous sommes chrétiens. Nous sommes unis dans le sang, même si entre nous, nous ne parvenons pas encore à faire les pas nécessaires vers l’unité, et peut-être n’est-il pas encore temps. L’unité est une grâce, que l’on doit demander.»
4. La réforme de la Curie romaine se concrétisera en février.
« Le travail est long. […] Nous avons reçu des suggestions de la part d’évêques du monde entier. Lors de la dernière réunion, les huit cardinaux ont déclaré que le moment était venu de faire des propositions concrètes, et lors de la prochaine rencontre, en février, ils me remettront leurs premières suggestions. »
5. l’Église et la politique doivent établir un rapport parallèle et convergeant à la fois.
« Parallèle, parce que chacun a son propre chemin et ses devoirs. Convergeant, seulement pour aider le peuple. Quand les rapports convergent avant, sans le peuple, ou en se moquant du peuple, c’est alors que commence cette connivence avec le pouvoir politique qui finit par contaminer l’Église : les affaires, les compromis… Il faut établir des parallèles, avec pour chacun une méthode, des devoirs et une vocation propres. La convergence ne se fait que dans le bien commun ».
6. Il n’est pas question de « cléricaliser » les femmes, par exemple en créant des "cardinales" :
« C’est une trouvaille sortie de je ne sais où. Les femmes dans l’Église doivent être valorisées, et non pas ‘cléricalisées’. Ceux qui envisagent que des femmes deviennent cardinales souffrent un peu de cléricalisme ».
7. Le travail d’assainissement du IOR (dit ‘banque du Vatican’) se poursuit :
« Les commissions référentes effectuent un bon travail. Moneyval nous a remis un bon rapport, nous sommes sur la bonne voie. Concernant le futur du IOR, nous verrons. Par exemple, la ‘banque centrale’ du Vatican serait l’Apsa. Le IOR a été institué pour aider les œuvres religieuses, les missions, les églises les plus pauvres. Puis il est devenu ce qu’il est aujourd’hui ».
8. Noël doit rappeler aux chrétiens ce que sont l’espoir et la tendresse :
« En venant à notre rencontre, Dieu nous dit deux choses. La première est : ayez de l’espoir. Dieu ouvre toujours les portes et ne les referme jamais. C’est comme un papa qui nous ouvre les portes. Et la deuxième : n’ayez pas peur de la tendresse. Lorsque les chrétiens oublient l’espoir et la tendresse, ils deviennent une Église froide, qui ne sait quelle direction emprunter et sombre dans les idéologies, dans les comportements mondains ».
9. L’Évangile est avant tout un message de joie :
« Noël n’a pas été la dénonciation de l’injustice sociale, de la pauvreté, il a été un message de joie. Tout le reste sont des conséquences dont nous héritons. Certaines sont justes, d’autres le sont moins, et d’autres encore sont idéologisées. Noël est joie, joie religieuse, joie de Dieu, intérieure, de lumière, de paix. Quand nous n’avons pas la capacité ou que nous sommes dans une situation humaine qui ne nous permet pas de comprendre cette joie, nous vivons la fête avec l’enthousiasme mondain. Mais il y a une différence entre la joie profonde et l’enthousiasme mondain ».
10. En ces temps de crises et de graves conflits, Noël est un appel de Dieu :
« Dieu ne fait jamais de don à celui qui n’est pas capable de le recevoir. Tous, du plus saint au plus pécheur, du plus juste au plus corrompu. Même le corrompu a cette capacité : le pauvre est sans doute un peu rouillé mais il l’a. Noël, en ces temps de conflits, constitue un appel de Dieu, qui nous fait ce don. Voulons-nous le recevoir ou préférons-nous d’autres présents ? »
11. Face à la souffrance d’enfants gravement malades, nous devons nous tourner vers la « prière du pourquoi » :
« À un certain moment de sa vie, l’enfant se « réveille », il y a plein de choses qu’il ne comprend pas, il se sent menacé, il commence à poser des questions à son papa ou à sa maman. C’est l’âge des « pourquoi ». Mais lorsque l’enfant pose la question, il n’écoute pas tout ce qu’on lui répond, il lance immédiatement de nouveaux « pourquoi ?». Ce qu’il cherche, au-delà d’une explication, c’est le regard du papa qui rassure. Face à enfant souffrant, l’unique prière qui me vient à l’esprit est la prière du pourquoi. Pourquoi Seigneur ? Lui ne m’explique rien. Mais je sens qu’Il me regarde. Et ainsi je peux dire: Toi, Tu sais pourquoi, moi je ne le sais pas et Tu ne me le dis pas, mais tu me regardes et j’ai confiance en Toi, Seigneur, j’ai confiance en ton regard ».