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Chine : pourquoi parle-t-on d’Eglise souterraine?

Photo d'illustration.

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La rédaction d'Aleteia - publié le 06/11/13
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En Chine, l’Eglise catholique est théoriquement reconnue par la loi mais le gouvernement communiste ne tolère pas que les évêques soient nommés par le pape.

La Constitution de 1978 reconnaît plusieurs religions, dont le catholicisme. L’exercice de ces libertés est très limité.

Depuis la prise de pouvoir des communistes jusqu’à la révolution culturelle, les religions furent sévèrement réprimées en Chine. Après la mort de Mao Tse Toung, les autorités reconnurent plusieurs religions : le catholicisme, le protestantisme, l’islam, le taoïsme et le bouddhisme.

Comme dans tout pays, cette liberté est limitée par l’ordre public et l’obéissance aux lois en vigueur. Cette appréciation est d’autant plus fluctuante que, dans cet immense pays, il existe bien des différences selon les régions.

De toute façon, la liberté religieuse ne comporte pas la liberté d’expression sur tout sujet où le gouvernement et le Parti estiment détenir, seuls, l’autorité. Les religions peuvent être utiles pour l’ordre moral et leur action philanthropique. Mais elles sont interdites de parole sur la société, l’économie, la politique.

Comme tous les régimes autoritaires, le Parti communiste chinois veut avoir la main sur les évêques. Ceci est contraire à la pratique millénaire de l’Eglise catholique.

Dans le Credo, nous disons que l’Eglise est « apostolique ». Elle est fondée sur les apôtres, autour de Pierre. Les évêques sont les successeurs des apôtres. Eux-mêmes sont des évêques « catholiques » s’ils sont en communion avec le successeur de Pierre, l’évêque de Rome, le pape.

Le signe de cette communion, c’est que le nouvel évêque soit nommé par le pape. Au minimum, s’il est désigné par une autre instance, que celle-ci propose son nom au pape pour que celui-ci le reconnaisse comme évêque catholique.

Le pape ne peut pas accepter que les évêques soient nommés par le gouvernement d’un Etat qui fait profession d’athéisme. Concrètement, par le Parti communiste chinois.  
Le problème n’est pas nouveau. L’Eglise l’a bien connu avec les « démocraties populaires » et les tentatives de création d’Eglises nationales, en rupture avec Rome et donc plus aisément manipulables.

Les catholiques de Chine sont ainsi divisés entre une Eglise « patriotique » et une Eglise « souterraine », parfaitement connue de la police.

Il est impossible de donner le nombre des catholiques chinois. Ils sont, certes, une infime partie de la population. Mais quand cette population s’élève à un milliard quatre cents millions de personnes, une infime minorité finit par faire du monde.

Devant l’ingérence du Parti dans les affaires religieuses, les catholiques chinois se divisent. Faut-il privilégier à tout prix la fidélité à Rome ? Faut-il s’accommoder de ce que demande le gouvernement, tout en professant qu’on est bien membres de l’Eglise catholique ?

Ces deux attitudes se concrétisent en deux formes d’Eglise : l’Eglise « patriotique » et l’Eglise « souterraine ». Les membres de la seconde ne sont pas moins patriotes que les membres de la première. Quant à la clandestinité, c’est un leurre dans un pays totalitaire, où la police sait tout sur tout le monde. 

Cette situation a été vécue en France, lors de la Révolution. Les prêtres pouvaient-ils prêter serment à la Constitution civile du clergé, constitution sur certains points contraire à la nature de l’Eglise ? Ainsi se constituèrent deux  clergés : « réfractaire » et « constitutionnel ». Le premier fut pourchassé et connut bien des martyrs.

La lettre du pape à tous les catholiques de Chine en 2007 a été mal reçue par les autorités chinoises qui en ont interdit la publication.

Le pape Jean Paul II avait toujours espéré pouvoir se rendre en Chine : espoir déçu. Son successeur voudrait – et quel chrétien ne le voudrait pas ? –  que le troisième millénaire soit celui de l’évangélisation de l’Extrême Orient. Il pense que des opportunités sont ouvertes aujourd’hui. Mais une des conditions, c’est l’unité de l’Eglise catholique en Chine.

A cette fin, il écrivit une longue Lettre, destinée à tous les catholiques de Chine, en 2007. Suivant la doctrine du concile Vatican II, il montre que l’Eglise catholique ne revendique aucun pouvoir politique et qu’elle veut travailler loyalement au bien commun. Il explique dans quelles conditions des catholiques peuvent coopérer avec des organismes de l’Etat.

Pour la nomination des évêques, il indique comme légitime la consultation du gouvernement. Il dit comment pourrait se régulariser la situation des évêques ordonnés sans le consentement de Rome. Il donne aussi un certain nombre d’orientations pour la vie chrétienne et le rayonnement de l’Evangile aujourd’hui en Chine.
Si respectueux que soit le texte dans le fond et la forme, le gouvernement chinois l’a considéré comme une ingérence intolérable d’une puissance étrangère dans les affaires de la Chine. Il en a interdit la publication. Mais le texte avait déjà circulé sur internet.

Le conflit renaît sans cesse à l’occasion des ordinations épiscopales.

Rome a toujours cherché à ce que les communautés chrétiennes soient pourvues de pasteurs et à ce que l’unité se reconstruise.

En France, au sortir de la Révolution, dans le Concordat signé avec Napoléon Bonaparte, le pape accepta de demander leur démission à tous les évêques en place, qu’ils soient « réfractaires » ou « constitutionnels ». Pratiquement tous ont donné leur démission et de nouveaux évêques ont pu être nommés.

Toujours en France, actuellement, par suite de l’Histoire, les évêques de Strasbourg et de Metz sont nommés conjointement par le Vatican et par le gouvernement français.

C’est dire que Rome sait faire preuve de souplesse, si l’essentiel est sauf : que le caractère « national » ne l’emporte pas sur le caractère universel que comporte le mot « catholique ».

Dans les dix dernières années, des aménagements semblaient avoir été trouvés : reconnaissance par Rome de la plupart des évêques qui avaient été nommés par le gouvernement, s’ils le demandaient ; nominations nouvelles avec l’accord du gouvernement.
Hélas, quelques cas plus récents empêchent de croire la partie gagnée : nominations unilatérales par le gouvernement ; tentatives pour compromettre des évêques « clandestins » dans l’ordination d’évêques « patriotes » ; mise en quarantaine d’un évêque qui, après son ordination, démissionna de ses fonctions dans les organismes d’Etat.

La nomination récente d’un Chinois dans le service du Vatican qui s’occupe de ces questions permettra peut-être de renouer des contacts plus confiants. Car, dans l’Empire du Milieu, le langage de l’Eglise est, sans doute, du chinois.

 

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