L’évêque maronite de Lattaquié confie à l’Aide à l’Eglise en Détresse la détermination d’une majorité de Syriens à maintenir la coexistence pacifique entre chrétiens et musulmans.05/11/2013
Alors qu’on est toujours dans l’incertitude sur la possibilité d’une deuxième conférence internationale sur la Syrie (Genève 2), Mgr Elias Sleman, évêque maronite de Lattaquié, en Syrie, brosse un sombre tableau de la situation de son pays.
Selon lui, les médias « ne saisissent pas vraiment la situation telle qu’elle est ». Il explique :
« Le printemps arabe a clairement été dépeint comme un mouvement pour la liberté et la démocratie, mais les résultats réels, par exemple en Libye, en Égypte et au Yémen, prouvent le contraire. À bien des égards, l’Occident est mal informé, y compris ses Églises, malgré de bonnes intentions. En ce moment même, en Syrie, il convient de dire que les rebelles modérés et les islamistes ont commencé à s’affronter entre eux. »
Les grandes puissances du monde doivent donc agir vite pour empêcher la Syrie de tomber dans le chaos le plus total : « De grands efforts sont nécessaires pour établir un dialogue entre le régime et les éléments modérés de l’opposition. Les grands acteurs de la planète doivent s’engager sérieusement et exercer une pression réelle sur les différentes parties afin qu’elles reviennent à la table des négociations »
Et sur la capacité des chrétiens à rester sur cette terre, sur le risque de voir la terre biblique se vider de ses chrétiens ?
L’évêque est catégorique : « Nous ne pouvons permettre qu’il n’y ait plus de chrétiens dans le pays, parce que la présence chrétienne aide les musulmans à être modérés. C’est ce que Jean-Paul II a dit sur le Liban : « C’est plus qu’un pays, c’est un message [de coexistence entre musulmans et chrétiens]. L’environnement musulman bénéficie de l’engagement de la foi chrétienne, laquelle assure bien sûr aussi notre propre ouverture à l’égard du monde musulman (…) Pour pouvoir vraiment vivre ma foi, j’insiste sur deux piliers principaux — Dieu, qui est absolu dans les cieux, et l’Homme, dont la valeur est absolue sur la terre. En touchant l’un, vous touchez l’autre. »
Et encore: « Nous avons vécu ensemble en Syrie pendant 1400 ans. Pourquoi n’arrivons-nous plus à vivre ensemble ? C’est la grande question. Nous, chrétiens, voulons rester, et les musulmans modérés veulent la même chose. Pourquoi des djihadistes et fondamentalistes musulmans viennent- ils en Syrie et ailleurs, et font-ils tout pour que cette coexistence ne soit plus possible ? Nous ne devrions pas diviser des pays et des régions en suivant des lignes de fracture religieuses. Il y a là un grand risque : un pays qui n’a qu’une seule religion devient extrémiste, provoquant la guerre. La religion ne doit pas servir de prétexte à la violence. »
Lire tout l’entretien sur le site de l’AED: http://www.aed-france.org/actualite/syrie-loccident-est-mal-informe-y-compris-ses-eglises/