Amnesty International publie un rapport accablant sur la situation des chrétiens dans le pays sous l’œil passif des autorités
Amnesty International vient de publier un rapport dénonçant les discriminations et les persécutions dont les chrétiens sont victimes en Égypte.
Titre de ce rapport : « Égypte : Jusqu’à quand allons-nous continuer à vivre dans cette injustice ? Les chrétiens d’Égypte entre attaques sectaires et inaction de l’État ».
Selon un communiqué d’Amnesty, résumant ce rapport, celui-ci revient sur les attaques qui ont visé les communautés coptes, après la dispersion de deux rassemblements pro-Morsi au Caire, le 14 août. Les forces de sécurité sont accusées de « ne pas être intervenues pour empêcher des foules en colère de s’en prendre et de mettre le feu à des églises, à des écoles et à des bâtiments associatifs coptes, dont certains ont été entièrement détruits ».
À la lumière des attaques qui avaient déjà eu lieu auparavant, surtout depuis la destitution de Mohamed Morsi le 3 juillet, Amnesty pense qu’il aurait fallu anticiper les représailles contre les coptes. L’organisme enjoint donc les autorités égyptiennes « d’ouvrir une enquête indépendante et impartiale sur ces attaques sectaires et de prendre immédiatement des mesures pour empêcher qu’elles ne se reproduisent ».
« Ne pas poursuivre en justice les responsables présumés de ces attaques équivaut clairement à dire que les coptes et les autres minorités religieuses sont des cibles légitimes. Les autorités doivent veiller à ce qu’il soit parfaitement clair que des attaques sectaires ne seront en aucun cas tolérées », estime Hassiba Hadj Sahraoui, directrice adjointe du programme Moyen-Orient et Afrique du Nord d’Amnesty International.
Amnesty rapporte la consternation d’un copte du gouvernorat de Fayoun devant toutes ces violences : « Pourquoi, quand il y a un problème, les chrétiens en font-ils toujours les frais ? Qu’est-ce que nous avons à faire avec les événements du Caire pour être punis ainsi ? »
Selon des témoignages recueillis auprès des habitants, responsables locaux et dirigeants religieux d’Al Minya, Fayoum et au Grand Caire :
« Des foules d’hommes en colère équipés d’armes à feu, de barres de fer et de couteaux ont mis à sac des églises et des propriétés appartenant à des chrétiens. En lançant leurs attaques, plusieurs criaient des slogans tels que « Allah est grand » ou vitupéraient « chiens de chrétiens » ou des expressions analogues. Des objets à valeur historique et des reliques ont été profanés. Parmi les graffiti gribouillés sur les murs on pouvait lire entre autres « Morsi est mon président » et « Ils ont tué nos frères pendant la prière ».
Ces messages, commente Amnesty, « laissent peu de place au doute quant à la nature sectaire des attaques. Ils témoignent en outre d’un lien évident entre ces événements et la répression contre les sympathisants de Morsi au Caire. »
L’organisme estime qu’étant donné qu’il s’agissait de représailles à la répression des rassemblements pro-Morsi, les dirigeants des Frères musulmans « doivent condamner les actes de leurs sympathisants et les exhorter à ne pas se livrer à des agressions ni à des propos sectaires. ».
La sortie du nouveau document d’Amnesty International coïncidait avec le deuxième anniversaire, en Egypte, d’une sanglante répression des forces armées qui, le 9 octobre 2011, s’est abattue sur des manifestants devant le bâtiment de la télévision d’État au Caire, appelé Maspero. Ce jour-là, 26 coptes et un musulman avaient été tués.
Or seuls trois soldats ont été condamnés à des peines d’une à trois années d’emprisonnement pour homicide involontaire.
Réaction de Mme Sahraoui : « Pendant trop longtemps les chrétiens d’Égypte ont été les principales victimes de la violence sectaire. Cette passivité de la part des autorités doit changer. Les paroles condamnant les actes doivent être accompagnées de mesures concrètes de protection des minorités religieuses. L’État doit garantir pleinement réparation, y compris une indemnisation financière, aux victimes d’attaques sectaires. Il faut donner la priorité à la reconstruction des lieux de culte et faire tomber sans tarder les obstacles juridiques à la construction d’églises. À défaut de mesures concrètes de cet ordre, les coptes auront encore une fois servi de prétexte pour des règlements de comptes politiques. »
Le communiqué d’Amnesty international en entier: http://www.amnesty.org/fr/for-media/press-releases/egypt-christians-scapegoated-after-dispersal-pro-morsi-sit-ins-2013-10-09
Le rapport original en anglais : http://www.amnesty.org/en/library/info/MDE12/058/2013/en
I.C